"J’ai eu la peur de ma vie" : présent lors des affrontements en marge d'OL - PSG, il témoigne | OneFootball

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·9 June 2024

"J’ai eu la peur de ma vie" : présent lors des affrontements en marge d'OL - PSG, il témoigne

Article image:"J’ai eu la peur de ma vie" : présent lors des affrontements en marge d'OL - PSG, il témoigne

Pour son premier déplacement, Martin* fan de l'OL, était dans le convoi qui reliait Lyon à Lille pour la finale de la Coupe de France. Témoin des affrontements avec des supporters du PSG au péage de Fresnes-lès-Montauban, il nous raconte sa version des faits.

Deux semaines après les tristes événements du péage de Fresnes-lès-Montauban, Martin a souhaité nous livrer son témoignage des affrontements qui s'y sont déroulés entre supporters de l'OL et du PSG. Il avoue avoir eu "la peur de sa vie" ce samedi 25 mai.

Olympique-et-Lyonnais : pouvez-vous tout d'abord nous raconter la journée jusqu'à l'arrivée au péage ?


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Martin : Tout d’abord, il faut savoir que c'était mon premier déplacement. Je suis abonné en Virage Nord, mais je n’ai jamais eu l’expérience de vivre un déplacement. Donc, j’étais très excité et surtout euphorique de vivre une finale pour mon premier voyage. Le départ était prévu aux alentours de 6 heures, nous avions rendez-vous à 5h30. L’ambiance était bonne, mais les bus se sont fait attendre et n'ont débarqué que vers 8h15. Nous sommes partis vers 8h45 d’après mes souvenirs.

Les premières heures se déroulent normalement. Les cars ne présentent pas de problème et se suivent globalement tous. Puis, plus tard, vers 11 heures, je crois, un changement de chauffeur est prévu. On s’arrête donc à une aire d’autoroute pour effectuer le remplacement. Le nouveau chauffeur a mis au moins une bonne heure et demie à arriver, donc encore du retard accumulé. Ensuite, le trajet reprend son cours, jusqu’au péage, que nous atteignons très en retard.

"Des gens cagoulés commencent à s'approcher de nous"

Comment se déroulent les événements une fois que vous arrivez à Fresnes-lès-Montauban ?

Ensuite, au moment où l’on s’approche du péage, j’aperçois par ma fenêtre deux bus parisiens nous doubler sur ma gauche en tapant sur les vitres et en nous "provoquant". On sentait une folie chez eux, ils étaient à bloc. De notre côté, on répond par des coups sur nos fenêtres et des regards. Puis 100 mètres plus loin, plusieurs cars sont à l’arrêt. Au début, je ne constate pas s'il s’agit de véhicules à nous ou aux Parisiens. Plus on avance, plus la tension monte. Je m’inquiète un peu, mais je me dis que c’est juste de la provocation et que ça en restera là.

On finit par être à l’arrêt au péage car des bus sont devant nous et doivent le passer. On est donc immobiles et à notre gauche, des cars parisiens aussi. La tension remonte jusqu’à ce que la porte d’un des véhicules franciliens s’ouvre. Des gens cagoulés sortent et commencent à s'approcher de nous. De notre côté, des supporters plus âgés et habitués aux déplacements veulent descendre. Le conducteur finit par ouvrir nos portes et les affrontements débutent autour de notre bus.

"On essaie de se défendre comme on peut, mais c'est impossible"

C'est le début du chaos ?

Je commence à monter en stress et ne comprends pas du tout ce qu’il est en train de se passer. J’essaie de rester calme, mais des projectiles tapent ma vitre. Je baisse donc ma tête et mets mon sac au-dessus de ma tête pour éviter de me prendre des bouts de verre si l'une d'elles éclate. Petit à petit, de plus en plus de gens descendent de chaque côté. J’aperçois que le nombre de Parisiens est trois ou quatre fois supérieur aux Lyonnais. Toujours dans le bus, je continue à entendre des tirs de mortier taper sur les vitres à des cadences hallucinantes, des projectiles qui font des bruits énormes. Certaines cèdent. Dehors, c'est le chaos, des bagarres horribles. Je commence à vraiment paniquer et tout de suite, je m’inquiète pour des proches à moi situés dans les autres cars. Je vois des gens se faire rouer de coups. Ils se font massacrer.

Un de mes proches arrive à me rejoindre dans le bus pour savoir comment je vais, je reste donc avec lui. Notre chauffeur refuse d’avancer et de céder la barrière du péage. Il quitte carrément le bus, nous laissant entourés de Franciliens qui essayent de rentrer dans notre véhicule. Certains arrivent à lancer des fumigènes dans notre bus à travers les fenêtres brisées. Des gens empêchent les Parisiens de pénétrer dans notre car, mais ils commencent de plus en plus à être pris à partie. Des proches à moi sont à mes côtés, mais l'un d'eux est en sang et l’œil complètement gonflé. On essaie de se défendre comme on peut, mais c'est impossible.

"C'était l’enfer"

A ce moment-là, j’ai la peur ma vie, peur de perdre mes proches ou qu’ils finissent défigurés, d’autant que les Parisiens avaient des tas d’armes différentes : des barres de fer, des couteaux et des tonnes de trucs que je n'arrivais pas distinguer. Je ne saurais même pas dire combien de temps cela a duré, mais c'était l’enfer. A un moment, on commence à être un peu asphyxiés par une odeur qui ressemble à un fumigène, on met donc notre tête dans les vestes. Un de mes proches repère que l’arrière du bus commence à prendre feu et que de la fumée noire se dégage de plus en plus. J’aperçois des flammes à un mètre de moi, je m’avance donc et là, tout le monde panique. On essaye de s’enfuir du bus comme on peut, sauf que l’on n'a aucun moyen d’ouvrir les portes. Le car ne contenait pas de brise-vitre. On essaye donc de faire des signes à des CRS à proximité, l’un d'eux nous voit et arrive à casser l’une des fenêtres avec une matraque. De là, je saute à travers la vitre et me réfugie derrière des voitures de gendarmerie. Je traverse les affrontements en courant.

"Des gens complètement en sang, avec des nez cassés, des bouts de lèvres arrachés..."

Ensuite, que faites-vous ?

Je reste là environ dix minutes. Je vois passer des gens complètement en sang, avec des nez cassés, des bouts de lèvres arrachés, des coupures, des coups au visage... C'était horrible. Plus les Parisiens se rapprochaient, plus on reculait jusqu’à se réfugier dans le champ à proximité. Les plus courageux et âgés forment une sorte de barrière au loin pour éviter que les Franciliens ne s’en prennent à nous. Étant jeune, j'étais avec femmes, enfants et des personnes de mon âge, mais ils essayaient tout de même de venir vers nous.

A l'issue de ces affrontements, le retour au calme se fait en combien de temps ?

En une heure, la situation s'est calmée et les blessés pris en charge... On a repris la route vers 20 heures, accompagnés par ce que j’appelle une vraie escorte, pas seulement quatre motos de gendarme.

Vous ralliez tout de même le stade...

On est arrivés à la 65e minute, puis on est repartis vers 2h30 du matin car on a dû attendre que d’autres bus arrivent en remplacement.

"J’ai été traumatisé, c'est certain"

Plusieurs semaines après ces événements, comment allez-vous ?

Je vais mieux. J’ai été traumatisé, c'est certain. J'ai du mal à tout reconstituer parce que je préfère parfois oublier ces images de chaos. Toutefois, j’ai eu des difficultés à reprendre mes activités professionnelles et, en général, à être à fond dans mes occupations. J’étais toujours un peu ailleurs et choqué de ces violences. J’en garde cependant des séquelles et l’angoisse est présente quand j’en parle.

Cela remet-il en question votre envie d'aller au stade, ou du moins de faire dans le futur les déplacements ?

OL à la vie à la mort. Jamais je n’arrêterai de supporter le club de ma vie. Je me suis réabonné et ça continuera.

*Le prénom a été modifié.

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