« Vous avez bousillé le produit », Joseph Oughourlian « supplie » de « travailler à un plan B » à DAZN | OneFootball

Visionnaire et leader de la fronde contre la gouvernance de la LFP et ses choix, Joseph Oughourlian poursuit sa lutte pour éclairer les décideurs du football français. Lors d’une réunion révélée publiquement par l’équipe de “Complément d’Enquête” (France 2) dans “l’After Foot” (RMC), le président du RC Lens a livré une longue démonstration pleine d’inquiétude pour la suite.

DAZN, un poids pour des années ?

Parmi les premiers à émettre ses doutes quant à la formule DAZN – beIN Sports, privilégiant un diffuseur unique et l’expérience téléspectateur pour un projet à long terme plutôt que l’apport cash à court terme, Joseph Oughourlian n’a pas seulement défié Nasser al-Khelaïfi lors de la désormais célébre réunion 14 juillet dernier. Dans « l’After Foot », ce lundi sur RMC, le réalisateur du numéro de « Complément d’Enquête » sur le PSG, Fabien Touati, a partagé un long extrait de la réunion du collège de Ligue 1 datant du 14 février 2025, pour le moins houleuse et marquée par une longue prise de parole du président-propriétaire du RC Lens

« Aujourd’hui, on a 400 000 abonnées, embraye-t-il. On était à 1,2 million avec Amazon et 3 millions avec Canal. 400 000 abonnés, c’est minable dans un pays de 65 millions d’habitants. Vous vous rendez compte ?! Vous vous rendez compte, pour revenir à des chiffres de l’ordre d’un million, de l’effort qu’il faudra faire ? Les gars, il ne va vraiment plus rien rester du tout. Il ne vaudra plus rien notre produit, il n’y aura plus aucun diffuseur à 400 000 abonnés. Faites les maths ! »

L’homme d’affaires franco-libanais poursuit en visant les décideurs du football français : « Je pense qu’aujourd’hui, le management de la Ligue – Vincent Labrune en particulier – et le management du collège (de Ligue 1) – Jean-Pierre Caillot – ont une responsabilité très important dans ce putain de désastre qui est le nôtre. Ce putain de désastre qui est le nôtre qui me laisse pantois à chaque fois que je le regarde. J’aimerais que ces gens-là prennent leurs responsabilités, mais c’est beaucoup trop leur en demander. Moi aussi, c’est mon fric perso qui va dans le club. Je vous en supplie (il insiste), il faut absolument travailler à un plan B avec des gens compétents. »

Un problème causé par Labrune et sa « clique éclairée »

Et de viser de manière plus appuyée certains collègues : « Tout le monde se plaint d’un manque d’information et d’un problème de gouvernance. Tout le monde sait qu’il y a une petite clique, dont tu fais partie Jean-Pierre (Caillot) qui contrôle l’information et la gouvernance. Cette petite clique, si elle était éclairée, si elle avait pris les bonnes décisions et si on était dans une autre situation, on serait tous là à vous applaudir. À l’évidence, ça n’a pas été le cas. Les décisions qui ont été prises depuis un an sont catastrophiques. Le problème, il vient du collège. On parle souvent d’intelligence collective. Dans notre cas, excusez-moi messieurs, mais on est quand même un sacré exemple de bêtise collective. »

« Toutes nos erreurs – Mediapro, Amazon, DAZN – viennent d’arbitrages du court terme contre le long terme, de trésorerie, de BFR contre le produit, liste-t-il, exaspéré. On n’apprend jamais de nos erreurs. C’est frappant, sidérant même. Il y a des gens qui apprennent des erreurs des autres. Il y a des gens qui apprennent de leurs erreurs. Nous, on la refait deux, trois fois. Là, vous avez bousillé le produit (il insiste). Là, c’est dix ans qu’on a devant nous pour revenir aux chiffres d’Amazon d’il y a trois ans en termes d’abonnés. Juste pour que ce soit clair, 400 000 ou 500 000 abonnés, cela valorise nos droits de 150 à 200 millions d’euros pour que ce soit clair pour tout le monde. Quand les prochaines négos’ commenceront avec Canal, avec DAZN, avec je ne sais pas qui pour notre chaîne, on est à 150 000 à 200 000 000. »

Avant de conclure, résumant son propos : « Grâce aux décisions de notre petite clique éclairée qui, derrière, a convaincu le collège L1, voilà où on en est. Ce que je vous en demande, je vous supplie, je me mets à genoux – parce que c’est mon fric et que j’en ai assez de payer les pots cassés de décisions qui n’ont ni queue ni tête -, essayez de travailler avec les gens qui comprennent ce marché pour repartir sur des solutions où on peut construire sur le long terme. Pensez produit, arrêtez de parler de trésorerie, de BFR. Trouvez des solutions de financement, il y en a, c’est “facile”. Au passage, pour les petits clubs comme Le Havre, Angers, voire Lens, il faut revoir la répartition de manière urgente. Cela ne fait aucun sens de filer les droits internationaux aux clubs qui jouent l’Europe, alors que les émoluments en Europe n’arrêtent pas d’augmenter. On ne fait que renforcer l’inégalité de notre ligue. Commençons à réfléchir à notre produit et à réfléchir long terme ». Reste à être entendu, ce qui ne sera pas une mince affaire.

Crédits photo : Dave Winter/Icon Sport