Le FC Sarrebruck, le plus français des clubs allemands | OneFootball

Situé à la frontière avec la Lorraine, le club de Sarrebruck, capitale de la Sarre, a connu après la Seconde Guerre mondiale un destin inédit, participant même au championnat de France de deuxième division.

Le Football Club de Sarrebruck (Saarbrücken en allemand) est né le 18 avril 1903 sous le nom de TV Malstatt. Il devient en 1909 le FV Saarbrücken. Jusqu’à la Seconde Guerre mondiale, le club évolue dans des championnats régionaux d’Allemagne du Sud-Ouest avec des équipes du Palatinat et de Bade.

Logo du 1. FC Sarrebruck

Lors de la saison 1942-1943, le club accède pour la première fois aux phases finales du championnat d’Allemagne. Les vingt-neuf vainqueurs des Gauliga (les championnats régionaux) se réunissent à l’époque lors d’une phase finale. Sarrebruck, vainqueur de la Gauliga Westmark, élimine Mulhausen 93 (Mulhouse) au premier tour (5-1), puis le Viktoria Cologne (5-0), Mannheim (3-2), et le First Vienna (2-1) en demi-finale. Les Sarrebruckois affrontent en finale Dresdner mais s’inclinent 3 buts à 0 à Berlin. Ils échouent en quarts l’année suivante.

À la sortie de la guerre, le club est dissous et refondé sous le nom de 1. FC Sarrebruck. Le club évolue dans l’Oberliga Südwest-Nord. La zone étant occupée par l’armée, un championnat de la zone d’occupation française est organisé et Sarrebruck l’emporte en 1945-1946. Il termine troisième en 1947 et deuxième en 1948.

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L’affaire sarroise

En 1947, la Sarre est détachée de l’Allemagne et devient une région autonome sous protectorat français. Certains politiques rêvent même d’annexion, et l’intégration par le football est souhaitée par de nombreuses personnes. En juillet 1948, la Fédération sarroise de football (FSB) est créée. Tout comme la Sarre est gérée par la France, la FSB dépend de la Fédération française de football.

Zones d’occupation de l’Allemagne. La Sarre se trouve à proximité de la Moselle et du Luxembourg.

On interdit aux clubs sarrois d’affronter des équipes allemandes. Étant trop fort pour les autres équipes de la région, Sarrebruck est autorisé à jouer en deuxième division française lors de la saison 1948-1949. En effet, Angoulême n’a pas pu se présenter et il n’y avait alors que 19 équipes inscrites. Cependant, le club était considéré comme invité et affrontait l’équipe qui devait être en repos lors de chaque week-end.

Ses points n’étaient donc pas comptabilisés pour le championnat. Les équipes françaises ne prennent donc pas toutes au sérieux ces rencontres, alors que les Bleus et noirs ont une équipe très compétitive. Le FCS remporte alors de larges victoires : 5-1 contre Lens ou Nîmes, 10-1 contre Rouen, 6-0 contre Monaco, 4-0 contre le LOU, 6-1 contre Nantes et Toulon, 9-0 contre Valenciennes, 6-0 contre le CA Paris, 7-1 contre Amiens et Troyes…

En 38 matchs, le club remporte 26 rencontres, pour 7 nuls et seulement 5 défaites. Il inscrit 148 buts et n’en encaisse que 50. Si leurs points avaient été comptabilisés, ils seraient devenus champions avec 59 points (victoire à 2 points à l’époque) devant Lens et Bordeaux, 53 points. Mais c’est bien les Sang et or qui sont titrés. Sept joueurs du club sarrois figuraient parmi les dix meilleurs buteurs du championnat.

Une courte expérience

Une demande de participation est à nouveau faite pour la saison 1949-1950 auprès la FFF. Malgré le soutien de Jules Rimet, président de l’institution française, ils n’obtiennent pas l’accord. Ce sont notamment les représentants de la Ligue d’Alsace qui se portent contre cette intégration, de peur d’être assimilés à cette région germanophone. Le 23 juillet 1949, au conseil fédéral de la FFF, 354 personnes se prononcent contre leur intégration et 7 s’abstiennent. Le président Rimet est désavoué et doit démissionner de la présidence qu’il occupait presque sans discontinuité depuis 1919 (Henri Jevain n’était président que de 1942 à 1944).

Extrait du Tell le 6 août 1949 (Gallica).

Les Sarrois sont alors obligés de jouer des matchs amicaux pendant deux saisons. Ils organisent la Coupe internationale de la Sarre, qu’ils remportent en 1950 face au Stade Rennais (4-0). Sarrebruck effectue aussi des tournées à travers l’Europe (victoire 4-0 sur la pelouse du Real Madrid, 1-1 à Liverpool…)

Une équipe nationale de Sarre est aussi créée en 1950. Elle est composée en grande majorité de joueur de Sarrebruck. Ils participent notamment aux matchs de qualifications pour la Coupe du monde 1954 et terminent deuxièmes de leur groupe derrière l’Allemagne de l’Ouest (défaites 3-1 et 3-0), mais devant la Norvège (victoire 3-2 à l’extérieur et 0-0 à Sarrebruck).

Le retour en championnat d’Allemagne

En 1951-1952, le club est de nouveau autorisé à jouer dans le championnat allemand, dans l’Oberliga Südwest. Ils remportent leur championnat régional dès la première saison et accèdent aux phases finales. Ils terminent premier de leur poule à quatre qui comprend Nuremberg, Hambourg et Schalke 04. En finale, ils s’inclinent 3 buts à 2 face à Stuttgart.

En tant que représentant de la Sarre, le club a participé à la première Coupe des clubs champions européens, lors de la saison 1955-1956. Au premier tour, ils affrontent l’AC Milan. Sarrebruck s’impose 4-3 au match aller à San Siro, mais ils se font éliminer au retour, en s’inclinant 4-1 à domicile.

Jouant toujours le haut de tableau de l’Oberliga Südwest, Sarrebruck performe aussi en Coupe d’Allemagne. Les Bleus et noirs atteignent les demi-finales en 1957 (défaite 3-1 contre le Bayern Munich) et en 1958 (défaite 4-1 contre Stuttgart).

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Sarrebruck présent lors de la fondation de la Bundesliga

Le FC Sarrebruck fait partie des seize clubs fondateurs de la Bundesliga en 1963 mais ils terminent dernier et sont directement relégués. Depuis, ils n’ont effectué que quatre saisons dans l’élite allemande : 1976-1977, 1977-1978, 1985-1986 et 1992-1993, avec en prime les titres de Bundesliga 2 en 1976 et 1992.

Le club oscille entre la deuxième division (Regionalliga Südwest puis Bundesliga 2) et la troisième division (Oberliga Südwest, Regionalliga puis Liga 3). En 1984, alors pensionnaires de Bundesliga 2, ils atteignent à nouveau les demi-finales de Coupe d’Allemagne et sont éliminés 1-0 par le Bayer 05 Uerdingen, futur vainqueur de la compétition.

À partir de 2006, le club entre dans une période difficile. Seizième de Bundesliga 2, il est relégué en Liga 3, qu’il ne connaît qu’une seule année car il descend à nouveau. Alors en quatrième division, il termine 5e mais avec la réorganisation des championnats, seuls les quatre premiers sont maintenus et le club tombe en 5e division. Depuis, le club remonte petit à petit, pour atteindre aujourd’hui le haut de tableau de Liga 3.

En 2019-2020, le club marque le pays. Il devient le premier pensionnaire de Regionalliga, la quatrième division, à se qualifier pour les demi-finales de Coupe d’Allemagne. Il élimine le Jahn Ratisbonne (D2) 3-2 au premier tour, Cologne (D1) sur le même score au deuxième tour, puis Karlsruhe (D3) 0-0, 5-3 tab en huitièmes et le Fortuna Düsseldorf (D1) 1-1, 7-6 tab en quarts. Leur parcours est stoppé par le Bayer Leverkusen 3-0 en demi-finale.

Karim Bellarabi face à Anthony Barylla en demi-finale de Coupe d’Allemagne.

Une amitié avec Nancy

Situé à 105 kilomètres de Nancy, le FC Sarrebruck est lié au club du chardon. Les Supporters Club 95 sont amis avec les ultras nancéiens du Saturday FC, depuis 1998. Cherchant à nouer des liens avec un club proche de la frontière, les Sarrois décident de jeter leur dévolu sur la ville ducale.

Des supporters allemands viennent ainsi supporter Nancy à domicile ou à l’extérieur et inversement. Lors de la victoire de Nancy en Coupe de la Ligue en 2006 contre Nice, des Sarrebruckois étaient présents au Stade de France. Des messages sont également déployés en Allemagne pour fêter les titres de Ligue 2 de Nancy, comme en 2016.

Le FC Sarrebruck est aujourd’hui en troisième division. Même si elle n’est plus « l’équipe la plus intéressante du continent » comme l’avait exprimé Jules Rimet à la fin dans les années 1940, elle est parvenue au fil du temps à créer quelques exploits et espère bien un jour, retrouver son glorieux passé.

Sources :

Crédits photos : Icon Sport