Lucarne Opposée
·2 juin 2023
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·2 juin 2023
Au premier semestre 1996, Palmeiras écrit l’histoire avec un football offensif qui lui permet de remporter le championnat paulista et de dépasser les cent buts marqués au cours de la compétition.
L’histoire de Palmeiras change en 1992 lorsque le président du club Carlos Bernardo Facchina Nunes annonce un partenariat avec l’entreprise Parmalat, qui fait venir de nombreux joueurs internationaux à Palmeiras. Les résultats arrivent rapidement pour le Verdão, qui n’avait plus gagné de titres depuis 1976. Palmeiras domine aussi bien la scène régionale que nationale avec un doublé championnat paulista – Brasileirão aussi bien en 1993 qu’en 1994, décrochant également le tournoi Rio-São Paulo 1993 face au grand rival, le Corinthians. L’année 1995 est plus difficile, l’entraîneur Vanderlei Luxemburgo quitte le club, tout comme des cadres de l’équipe comme Mazinho, Edmundo, Zinho et Evair. Le nouvel entraîneur Carlos Alberto Silva peine à obtenir les mêmes résultats que Vanderlei Luxemburgo malgré une finale du championnat paulista, perdue face au Corinthians. Roberto Carlos et Edílson quittent également le club, Palmeiras est en fin de cycle.
Avant même la fin du Brasileirão 1995, Palmeiras, pourtant pas encore officiellement éliminé, se tourne déjà vers la saison 1996. Le club alviverde rappelle son ancien entraîneur Vanderlei Luxemburgo et recrute deux joueurs de Guarani, Djalminha et Luizinho. « Palmeiras avait encore des chances d’être triple champion du Brésil en 1995, mais c’était difficile. Luxemburgo a décidé de lancer la serviette et les crampons sur la pelouse du Brasileirão. Avant la fin de saison, il a recruté le duo bagrino, qui a commencé à assimiler ce qu’il voulait pour 1996 à la fin de la saison précédente. Ils ont commencé à s’entraîner en 1995 », explique José Ezequiel Filho dans le livre 20 jogos eternos do Palmeiras de Mauro Beting. « On a commencé la saison en janvier 1996 comme si on était en avril. L’effectif, bien préparé physiquement par Luis Inarra, était bien au-dessus des rivaux. L’équipe, extrêmement technique, a profité de cette forme physique et des automatismes acquis dès novembre 1995 pour commencer l’année 1996 à deux cents à l’heure », complète Nonno Beppe dans le même livre.
Palmeiras présente une équipe très complète et technique, les milieux défensifs Flávio Conceição, Amaral ou Galeano offrent de la liberté aux latéraux ultras offensifs Cafu et Júnior, recruté en provenance de Vitória. L’animation offensive est assurée par deux craques, Rivaldo et Djalminha, fils de Djalma Dias, ancienne légende de Palmeiras, alors que le vétéran Müller, moins rapide qu’auparavant, évolue dans un nouveau registre, où il est surtout chargé d’alimenter en ballons le jeune Luizão, buteur insatiable. Sur le banc, le polyvalent Elivélton peut remplacer n’importe quel joueur offensif. Dès le deuxième match amical de la saison, Palmeiras écrase le Borussia Dortmund, futur vainqueur de la Ligue des champions, sur le score de 6-1, avec notamment un triplé de Rivaldo. « Vous pouvez l’écrire : cette équipe va marquer l’histoire. Elle va bien jouer, jouer rapidement, va être offensive et elle peut être championne de toutes les compétitions disputées », déclare déjà l’entraîneur Vanderlei Luxemburgo. Quelques jours plus tard, un but à la dernière minute de Rivaldo permet au Verdão d’obtenir un match nul contre Flamengo et de remporter la Copa Euro-América. La saison de Palmeiras est déjà bien lancée.
Dès ses deux premiers matchs du championnat paulista, Palmeiras réalise ce qui va faire sa marque de fabrique au cours de la compétition : des goleadas, un 6-1 contre Ferroviária puis un 7-1 contre Novorizontino. Luizão, vingt ans, pointe déjà à cinq buts. Mogi Morim plie sur le score de 3-0 puis União São João réalise ce qui sera finalement un exploit en tenant le 0-0. La victoire 4-1 face au Juventus marque le début d’une série incroyable, Palmeiras remportant vingt-et-un matchs consécutifs entre le championnat paulista et la Coupe du Brésil ! Encore plus impressionnant, sur ces vingt-et-un matchs, le Verdão s’impose douze fois en goleada, c’est-à-dire une victoire par au moins trois buts d’écart en marquant au moins quatre buts. Les cadors du championnat paulista, comme la Portuguesa, São Paulo et le Corinthians sont battus par deux buts d’écart alors qu’en ouverture de la Coupe du Brésil, Palmerais écrase Sergipe 8-0 avec un quadruplé de Luizão ! Dans le championnat paulista, le Botafogo de Ribeirão Preto plie sur le même score, avec une panenka de Djalminha, déjà auteur d’un but contre le Corinthians après seulement quarante secondes de jeu. Le tableau d’affichage du stade s’arrête cependant à sept buts, le panneau avec le numéro 8 n’ayant pas été anticipé ! « Je n’ai jamais vu un football aussi dévastateur, aussi brillant, aussi spectaculaire que celui de Palmeiras du premier semestre 1996. Le seul doute concernant cette équipe était le nombre de buts à la fin du match. Si cela allait être un festival de buts ou seulement une goleada de Palmeiras », explique Nonno Beppe dans le livre 20 jogos eternos do Palmeiras de Mauro Beting.
Palmeiras écrase l’América 6-0, tous les buts étant inscrits par le quarteto Rivaldo – Djalminha – Müller – Luizão. « Ils attaquent sur les ailes et on essaye de neutraliser les ailes. Alors ils attaquent au milieu et on essaye aussi de neutraliser le milieu. Ils viennent alors en diagonale et on essaye de bloquer la diagonale. Si on arrive à tout bloquer, Cléber arrive de derrière et marque », s’incline l’entraîneur americano Leal. Dans la foulée, Palmeiras se rend au Vila Belmiro pour affronter Santos, finaliste quelques mois plus tôt du Brasileirão. Palmeiras domine complètement la rencontre, 3-0 à la mi-temps, avec un doublé du défenseur central Cléber, et un 6-0 historique au final, Rivaldo s’offrant également un doublé alors que Cafu et Djalminha complètent la marque. Le Verdão remporte le premier tour du championnat paulista et se qualifie pour la finale, impressionnant le Brésil tout entier. Dans le documentaire 20 anos do Paulista de 1996 de la TV Palmeiras, Djalminha rend hommage à l’entraîneur Vanderlei Luxemburgo : « Il ne nous demandait pas de faire tourner le ballon après un 2-0. Il nous demandait de continuer à attaquer, il disait qu’on était supérieurs et qu’on devait marquer plus de buts ».
Le dernier match du premier tour, remporté 4-0 face à XV de Jaú, voit les débuts professionnels de la future légende Marcos, vingt-deux ans à l’époque, et qui profite en début d’année du départ de Sérgio pour devenir la doublure du gardien Velloso. Véritable armada offensive, Palmeiras est également redoutable défensivement : sur les cinq derniers matchs, les hommes de Luxemburgo marquent vingt-huit buts pour un seul encaissé ! Après un match plus accroché en Coupe du Brésil, remporté 2-1 sur le terrain de l’Atlético Mineiro de Taffarel, Ézio et Euller, Palmeiras reprend ses bonnes habitudes dès le début du second tour du championnat paulista en battant Ferroviária 5-1 puis Novorizontino 4-0. L’Atlético Mineiro plie aussi finalement et est défait 5-0au retour avec un doublé de Rivaldo, qui s’offre ensuite un triplé face à União São João, également battu 5-0. Le Juventus est écrasé 5-0, les doublés revenant cette fois à Djalminha et Müller, puis Palmeiras est enfin accroché, mais sort tout de même vainqueur avec des victoires d’un but d’écart face à São Paulo et la Portuguesa. Le match nul 2-2 face au Corinthians met enfin fin à une série impressionnante de vingt-et-une victoires, dont douze en goleada ! Palmeiras marque quatre-vingt-six buts sur ces vingt-et-une victoires consécutives, plus de quatre buts par matchs, et la série peut même être étendue à vingt-trois victoires en ajoutant deux matchs amicaux, remportés 8-0 contre Circuito das Águas et 4-0 contre Itapirense. « Peu de fois le maillot vert a été aussi bien porté par une équipe qui marquait un but et voulait en mettre un autre. Ordre de l’entraîneur : il ne voulait pas le “olé”, il voulait le but. La question n’était plus de savoir contre qui était le match, c’était de combien serait le score », écrit le journaliste palmeirense Mauro Beting pour UOL.
Après un succès 2-0 en Coupe du Brésil contre Paraná, Palmeiras se fait surprendre au Brinco de Ouro et, face à Guarani, concède sa première défaite dans le championnat paulista. Le Verdão retrouve le chemin de la victoire face à Araçatuba, Paraná et Rio Branco, cette fois sans goleadas, jusqu’à un succès 4-0 sur le Botafogo de Rio Preto, marqué par le triplé de Djalminha, dont un corner direct pour rendre hommage à sa fille née la semaine précédente, mais surtout par la première titularisation de Marcos, quatre ans après avoir disputé un match amical. Marcos, qui disputera cinq-cent-trente-trois matchs avec Palmeiras jusqu’en 2011, seul maillot qu’il portera avec celui de la Seleção au cours de sa carrière, arrête même un penalty pour célébrer sa première titularisation en match officiel avec Palmeiras. Marcos prend peu à peu la place de Velloso et est élu en 2022 par un panel de journalistes deuxième plus grande idole de Palmeiras, dépassé seulement par Ademir da Guia. Rivaldo marque le seul but de la rencontre face à l’América et Palmeiras peut remporter la deuxième phase du championnat paulista en cas de succès face à Santos, ce qui permettrait au Verdão d’être champion sans même avoir besoin de jouer une finale après avoir déjà remporté le premier tour. Avant le match, Palmeiras pointe à quatre-vingt-dix-neuf buts marqués dans le championnat.
Au Parque Antártica, un peu plus de deux mois après le 6-0 infligé au Vila Belmiro, Palmeiras retrouve Santos pour remporter un troisième championnat paulista en quatre ans. Comme un symbole, Luizão, meilleur buteur du club, ouvre le score au terme d’une action collective et marque le centième but de Palmeiras dans le championnat. Le zagueiro-artilheiro Cléber double la mise et la Máquina Verde remporte le vingt-et-unième championnat paulista de l’histoire de Palmeiras, égalant le record du rival Corinthians. Avec l’équipe réserve, Palmeiras conclut le championnat par une victoire 1-0 sur XV de Jaú et réalise le meilleur championnat paulista de l’ère professionnelle : vingt-sept victoires, deux matchs nuls, une défaite et quatre-vingt-trois points sur quatre-vingt-dix possibles, avec vingt-huit points d’avance sur le dauphin São Paulo ! Palmeiras marque cent-deux buts en trente matchs pour seulement dix-neuf encaissés, soit une différence de quatre-vingt-trois buts, la même à un but près que la somme des quatre premiers poursuivants ! « Cela a été le titre de l’équipe qui a le plus enchanté, qui a réalisé le championnat paulista le plus merveilleux de tous les temps, encore plus que les grands champions du passé. L’équipe ne se contentait pas de gagner sur une petite marge, elle voulait gagner plus et encore plus, elle respectait l’adversaire justement en marquant des buts, sans faire tourner le ballon ou provoquer. Elle jouait au football, dans son essence la plus pure », écrit Guilherme Diniz pour le site Imortais do Futebol.
Palmeiras a impressionné au cours du championnat paulista par sa puissance offensive, même si le meilleur buteur du tournoi évolue à Santos puisque Giovanni termine artilheiro du tournoi avec vingt-quatre buts, deux de plus que Luizão. Palmeiras s’appuie sur un collectif, Rivaldo marque dix-huit buts, Djalminha et Müller quinze chacun, le défenseur central Cléber en ajoute sept tandis que le joker offensif Elivélton marque six fois. Au cours du premier semestre de 1996, le Verdão se qualifie également pour la finale de la Coupe du Brésil malgré une défaite en demi-finale retour contre Grêmio, nouvel épisode de l’une des plus grandes rivalités brésiliennes des années 1990, histoire à retrouver dans le quatorzième numéro de notre magazine.
L’équipe de Palmeiras est pourtant démantelée rapidement, Müller rejoint São Paulo et ne joue même pas la finale de la Coupe du Brésil, finalement perdue contre Cruzeiro. Rivaldo signe à La Corogne, Amaral prend la direction de Parma et avec une équipe réserve, Palmeiras s’incline 5-1 au premier tour de la Copa CONMEBOL contre Bragantino. Malgré une victoire 3-0 au retour, Palmeiras est éliminé et recrute plusieurs joueurs, comme Leandro Ávila, Viola ou encore Freddy Rincón. Moins impressionnant offensivement, Palmeiras termine cependant meilleure attaque de la première phase du Brasileirão 1996 et troisième au classement, à un point du leader Cruzeiro. Le Verdão tombe pourtant dès les quarts de finale, une nouvelle fois contre Grêmio, futur champion. Cafu, Flávio Conceição et Djalminha rejoignent l’Europe au cours de l’année 1997 et ce Palmeiras, qui aura enchanté le Brésil entier au premier semestre 1996, n’aura pas l’occasion de remporter un titre national ou continental.
Malgré un seul titre remporté, Palmeiras a marqué l’histoire avec un football offensif développé par Vanderlei Luxemburgo et une boulimie de buts, comme l’écrit Mauro Beting pour UOL : « Contre les faits, il existe des arguments dans le football. Mais c’était une équipe qui captivait même les supporters des autres clubs. Il y a eu le meilleur joueur du monde 1999, il y a eu six champions du monde. Tous sont unanimes quand ils disent qu’elle a été la meilleure équipe dont ils ont défendu les couleurs. Ou mieux : attaqué, marqué, enchanté. Comme supporter du club, je n’avais pas besoin d’une telle équipe pour être encore plus palmeirense. Mais comme amoureux du football, j’apprécie encore plus ce sport pour une équipe comme celle-ci. Cela a duré peu de temps, mais c’est éternel ».