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·18 janvier 2020

La culture des socios en Espagne, une vraie religion

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Chaque week-end, ils se déplacent pour leur équipe. Toujours aussi fidèles et toujours plus acharnés, les socios ont toujours la même passion pour leur équipe dans leur antre favori. Une passion qu’on ne peut pas ôter. Et même une religion, qui devient une culture fondamentale.

Les socios ce sont des supporters, et même plus, qui jouent un rôle clé dans le fonctionnement de leur club. On pourrait les comparer aux ultras en Ligue 1 ou en Bundesliga. Ces socios sont membres, ou non, de peñas, ces associations qui regroupent un nombre important de supporters. Être un socio en Espagne, c’est une culture enseignée dès le plus jeune âge à son enfance. Un savoir et un devoir transmis de génération en génération, mais c’est avant tout une passion. Aujourd’hui, seulement quatre clubs possèdent encore des socios. On compte déjà les deux cadors : le Real Madrid et le FC Barcelone. Mais il y a aussi l’Athletic Club et le CA Osasuna. Ces clubs appartiennent et sont dirigés par les socios, ces personnages bien plus décisifs, dans la vie de leur club, qu’on ne le pense.


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Qui sont-ils et quel est leur rôle ?

Si on s’attache à ce point à l’image d’être socio en Espagne, c’est surtout parce qu’en être un reste assez prestigieux. D’ailleurs, les conditions pour le devenir sont de plus en plus restreintes. Le but des clubs est d’installer un climat de fidélité et de préserver la présence des habitués des matchs et également qu’ils aient droit à une place privilégiée. Par exemple, le FC Barcelone réclame d’avoir moins de quinze ans pour pouvoir devenir socio au sein du club. Ce sont des critères très précis qui sont mis en place pour faire partie de cette ferveur particulière. En Espagne, le terme d’aficion est régulièrement employé aussi pour parler des supporters qui sont derrière leur équipe, parfois jusqu’à l’excès.

En Espagne, le football occupe une place très importante de manière générale. Si bien qu’on estime que plus de trois quarts de la population ibérique est déjà allée voir un match. Être socio implique de s’engager, sur la durée, à venir voir le maximum de matchs de son équipe. Que son équipe joue à domicile, ou à l’extérieur, l’occasion est toujours bonne pour se déplacer avec l’attirail complet.

Le lieu de domicile, généralement proche de la localité du stade, est un fort atout. On comptait récemment que 37% des socios du Barça vivaient à Barcelone, 50% dans le reste de la Catalogne et seulement 13% en dehors de la communauté autonome. 85% de ces socios résident à moins d’une heure et demie en voiture du Camp Nou. Être un socio a aussi un coût. En moyenne, il faut débourser entre 650€ et 1000€ par an pour être un membre de ce « cercle privé ».

Le rôle le plus important pour un socio est certainement son droit de pouvoir voter pour la gestion de son club. Voter pour les décisions importantes qui feront l’avenir du club. Par exemple, élire le nouveau président. Notons qu’il faut être majeur et socio depuis au moins un an pour pouvoir voter. En Espagne, les quatre clubs mentionnés précédemment essaient d’accorder un maximum d’importance à leurs socios.

« Les socios sont les garants de l’identité du club et de son bon fonctionnement » Anthony Alyce, fondateur du site Ecofoot (Les Echos)

En octobre 2018, 11 118 socios du CA Osasuna ont ainsi été consultés. L’objectif était de connaitre leur opinion sur la possibilité de reconstruire un nouveau stade, prenant ainsi le relai de l’actuel stade El Sadar (90% se sont prononcés pour une reconstruction, NDLR). Cinq stades avec des noms différents furent proposés aux fans particuliers afin qu’ils choisissent leur nouvelle demeure. Les socios ont d’ailleurs choisi le Muro Rojo (Ce stade a été choisi avec 3 820 votes, le Nuevo Sadar a reçu 1718 votes, 1309 pour le Sadar Berria, 1022 pour le Rojo-Azul et le Fortaleza Rojilla seulement 287 votes, NDLR).

À la lecture de cette description de ce qu’est un socio, on peut rapidement comprendre qu’en être un c’est comme donner sa vie. Donner sa vie pour le club que l’on soutient ; à tel point de créer son propre club ?

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Un exemple : l’Atlético Club de Socios

Si on vous disait qu’un club fondé intégralement par des socios existait, vous y croiriez ? Pourtant, l’Atlético Club de Socios est un club fondé en 2007 par des socios de l’Atlético, lassés de ne plus être écoutés par leur direction. Effectivement, le club possède une véritable équipe de joueurs, tous présents sur le terrain pour la même cause que leurs supporters. Un cas qui mérite d’être examiné…

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Le club madrilène est un club qui n’est pas des plus riches. Au contraire, ses installations ne semblent pas forcément en très bon état mais c’est un phénomène voulu par la direction qui souhaite que le club fonctionne à taille humaine et dans le respect de tous. L’équipe évolue aujourd’hui en cinquième division dans son petit stade El Soto, en banlieue de Madrid. Malheureusement, l’affluence chaleureuse qui y régnait, il y a encore quelques années, semble disparaître.

« Les télévisions ont bouffé le football amateur. Les matches le dimanche à midi… Si le Real joue le dimanche à midi, tu vas aller la voir l’équipe de ton quartier ? Plus personne ne vient voir les matches. Aujourd’hui, il y a une centaine de personnes. Il y a dix ans, il y en avait 500. » Joaquin, un des dirigeants de l’Atlético Club de Socios (Furia Liga)

Dans le stade d’El Soto, les joueurs entrent sur la pelouse avec la même bande-son que celle des Colchoneros au Wanda Metropolitano. Mais les joueurs sont aussi alignés dans le même schéma tactique, à savoir le fameux 4-4-2 de Diego Simeone. L’ACS est attaché à son identité et ses valeurs de club amateur et également à sa gestion loin d’être reliée à la finance. Accepter un naming avec une entreprise afin de renflouer les caisses du petit club madrilène est tout simplement inconcevable.

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La direction avoue même avoir été contactée par le Rayo Majahonda il y a quelques années. Ce club de D3 a proposé une somme de 60 000€ à l’ACS pour acheter sa place en championnat. Une offre modestement refusée par le voisin de l’Atlético, solidement fixé à ses principes. D’ailleurs les joueurs du club ne s’attendent pas au luxe, mais cela ne les empêche pas de porter fièrement les couleurs de l’ACS.

« Avec le peu de moyens que l’on a, les joueurs sont confortables ici. Les joueurs passés par ici viennent nous voir même après avoir quitté le club. Le traitement qu’on leur donne est exceptionnel »Nacho, le directeur sportif du club (Furia Liga)

L’Atlético Club de Socios démontre aujourd’hui qu’un club de ferveur populaire qui appartient à ses socios, même avec peu d’argent, peut exister. Toutefois ce n’est malheureusement pas le cas de tous les clubs en Espagne…

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Parfois méprisés par les institutions

Aujourd’hui, comme le montre l’exemple de l’Atlético Club de Socios, une grande partie des socios, et même des simples supporters en général, se sentent de plus en plus trahis et mis de côté par les grosses institutions du football espagnol.

Les sorties médiatiques de Javier Tebas (président de LaLiga, NDLR) ont notamment agacé les supporters mais également certains joueurs. Une de ses propositions les plus loufoques est certainement celle de disputer un match de Liga aux Etats-Unis. Accepter une telle demande serait bien évidemment nuisible à un déplacement pour les socios, ne pouvant pas tous se déplacer en Amérique. Les joueurs ont très mal vécu cette proposition, qui est d’ailleurs toujours d’actualité, et ont même pensé à se mettre en grève. Les supporters, eux, ont boycotté à plusieurs reprises le début de certains matchs ou en sifflant l’hymne officiel de LaLiga, symbole de l’institution espagnole.

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Un autre fait qui a agacé, et qui fâche toujours, chez les supporters : ce sont les horaires des matchs. Les socios qui ont payé des abonnements se plaignent de plus en plus des horaires (12h, 13h…). Ces mêmes horaires sont problématiques car ils empêchent les socios de se déplacer au stade. Même problème pour les matchs en semaine qui tombent donc sur des jours où les socios et supporters travaillent.

« Un monsieur (sous-entendu Javier Tebas, NDLR) se moque de nous, qu’il mette les crampons et aille jouer à 16h15 à Séville » Yuri Berchiche en mai dernier critiquait l’horaire du match. En effet, ce match s’était déroulé sous une chaleur écrasante à Séville (AthleticClubFr)

En janvier 2019, les supporters du Deportivo Alavés avaient décidé de boycotter les cinq premières minutes du match face au Rayo Vallecano. Leur but était de montrer leur mécontentement de jouer des matchs le lundi soir (les matchs du lundi soir n’existent désormais plus en Liga, NDLR). Des plaintes que l’on retrouve également chez les supporters « typiques ». Une colère exprimée donc chez l’ensemble des aficionados espagnols.

Des motifs de plaintes qui s’entendent largement pour les supporters et surtout pour les socios, qui veulent être près de leur équipe.

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Être socio demande donc de l’énergie, du temps et surtout de la passion. C’est un rêve et un projet qui s’étendent sur toute une vie. Vivre le football, tout simplement, c’est ce que veulent les socios. Dans un monde où les finances sont privilégiées aux supporters, difficile pour eux parfois de se faire entendre. Toujours est-il que ce système si particulier permet aux plus passionnés de réaliser un rêve. Un rêve dans un pays où le sport se résume en grande partie au football. On retiendra que l’Espagne abrite encore une belle culture footballistique, enseignée avec passion et surtout dès le plus jeune âge.

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