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·11 février 2024

Exclu. Mansour Loum (Sport News Africa) : « C’est la meilleure Coupe d’Afrique sur et en dehors du terrain »

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Mansour Loum a assisté en tant que journaliste à sa septième et plus folle Coupe d’Afrique des nations en Côte d’Ivoire. Le rédacteur en chef de Sport News Africa est revenu sur la compétition, à la veille de la finale entre l’hôte et le Nigéria. Interview.

Befoot : Vous attendiez-vous à une telle compétition lors de votre arrivée en Côte d’Ivoire ?

Mansour Loum : On est sur la continuité de la Coupe du monde, donc il y avait les cinq mondialistes qui étaient sur une bonne dynamique, les absents du Mondial, qui étaient revanchardes, celles qui l’étaient par rapport à la dernière CAN… Mais je pensais que la logique allait être respectée, et que les gros allaient passer le premier tour, puis s’expliquer entre eux. Dès le premier match, tu te rends compte que ce ne sera pas le cas. Et à chaque scénario, il se passe quelque chose.


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Franchement, la CAN a commencé un samedi, trois quatre jours après – avant la fin de la 1ère journée des poules – je me dis “il se passe des choses bizarres“ ! La deuxième journée vient confirmer ça, la troisième, n’en parlons pas. Sportivement, personne ne s’attendait à ça.

On dit que les Ivoiriens ont excellé en termes d’organisation. Est-ce que le ressenti est partagé en tant que journaliste ?

Depuis que je couvre des Coupes d’Afrique des nations (2013), je n’en ai jamais vu une comme ça. Dans des compétitions aussi importantes, il y a toujours des petits couacs, mais en termes d’organisation : ça se passe bien. En termes de compétition : ça se passe bien. Concernant les pelouses : tu n’entends pas parler de problèmes les concernant. Même l’arbitrage – qui est souvent décrié – en oubliant le match entre le Sénégal et la Côte d’Ivoire où il y a eu beaucoup de problèmes, ça se passe plutôt bien.

S’il y a bien un point noir qui sera réglé après la CAN, c’est la billetterie. Ce n’est pas normal que ça soit si difficile d’avoir un billet sur la plateforme de la CAF ou sur les points de ventes physiques. Il y a des moments où tu te rends à un endroit spécifique à l’heure prescrite. Il ouvre à l’heure et il n’y a pas de billet. Tout le monde se renvoie la faute entre la COCAN et la CAF, qui finit par pointer du doigt les revendeurs. Sinon, pour en avoir avec des spectateurs et des journalistes, c’est la meilleure Coupe d’Afrique à la fois sur et en dehors du terrain.

S’il fallait décrire cette CAN en un seul mot, lequel serait-il ?

Improbable, dans tous les sens du terme. Tu vas dans des endroits et c’est improbable. Je décide d’aller visiter Abidjan et nous partons manger dans un maki, sans rien attendre. À la table d’à côté, il y avait A’salfo, le chanteur de Magic System, en toute simplicité.

La première partie de la compétition a livré son lot de surprises, avec des grandes nations bousculées par des petites nations qui se sont montrées à l’aise. Quel constat pouvons-nous faire de ces phases de poules ?

Il y a un pensif qui dit “il n’y a plus de petites équipes”. Je dirais que sur cette CAN, nous avons certes vu des équipes progresser, mais surtout des grosses régresser. Quelque part, j’aimerais alerter là-dessus. Il y avait des équipes dont on était sûr qu’elles pouvaient aller loin et d’autres où on savait que ça allait être un échec, notamment pour le Ghana. Il y a certaines nations qui ont été face à leur réalité du moment avec un problème de génération.

À côté de ça, il y a d’autres équipes qui ont confirmé leur bonne disposition du moment comme l’Angola, le Cap-Vert, et bien sûr la Mauritanie. C’est une CAN plein d’enseignements sur le plan sportif. L’Égypte a été méconnaissable, le Cameroun est passé de peu, je ne dirais pas que tous les petits ont surperformé, mais que les gros ont sousperformé. C’est pour ça que l’on a eu droit à autant de surprises.

« Cette CAN, nous avons vu des équipes progresser, mais surtout des grosses régresser. » Mansour Loum, rédacteur en chef de Sport News Africa

Cela démontre-t-il que le football africain devient de plus en plus homogène ?

Oui, mais est-ce que c’est dans le bon ou dans le mauvais sens ? Je ne saurais pas le dire. Je trouve que c’est un peu présomptueux de juger ça seulement sur une seule édition. Si on se rend compte qu’en 2025, lors de la prochaine CAN, c’est la même chose, on pourra en tirer des conclusions. Il y a des indicateurs qu’il y a un wagon de tête, un ventre mou, et un wagon de queue. Il y a des équipes qui ont cru pouvoir passer des tours grâce à leur statut. Sauf que non, le match se joue sur le terrain à onze contre onze.

Cette Coupe d’Afrique aurait pu être différente si Richard Ofori (gardien du Ghana), n’avait pas dévié de la main le ballon en corner face au Mozambique…

Sur l’histoire récente, des dix dernières années par exemple, de ce sport, je n’ai pas le souvenir d’un geste aussi anodin, qui a eu autant de répercussions. Cette faute de main, c’est elle qui conditionne la Côte d’Ivoire à être championne derrière. Un  slogan dit que les battements d’ailes d’un papillon au Japon créent un tsunami en Amérique, c’est exactement ça.

Sans ça le Ghana passe et la Côte d’Ivoire est disqualifiée. Derrière, le pays prend un coup. Avec dix-sept jours de compétition restante, l’engouement serait retombé. Le tableau des huitièmes de finale aurait totalement changé. Petite cause, mais très grands effets. Une expression ivoirienne dit “Cabri mort n’a pas peur du couteau” (signification : qu’est-ce qui peut te tuer si tu es déjà mort, NDLR). Après le dernier match du Maroc, la Côte d’Ivoire n’a rien à perdre.

Quelle rencontre a été la plus surprenante à vos yeux ?

Le 4-0 entre la Guinée équatoriale et la Côte d’Ivoire. À aucun moment, les Ivoiriens et la presse n’ont envisagé qu’elle ne se qualifie pas. Ils ont gagné le match d’ouverture de manière convaincante. Puis il n’y avait pas de honte à perdre contre le Nigéria. Il n’avait pas besoin de se tuer pour faire un résultat lors de la troisième journée sur le papier. Plus le match avançait, plus la mentalité du public changeait.

À 1-0, le public n’était pas alarmé. À 2-0, il faut au moins arracher le match nul. À 3-0, il ne faut plus encaisser pour ne pas être éliminé par le goal-average. À 4-0, c’était un cauchemar. Tout le monde était choqué, car même en anticipant le pire, ce scénario n’était pas envisagé.

Le Nigéria, l’Afrique du Sud, la Côte d’Ivoire et la RDC composaient le dernier carré. Au jeu des pronostics, très peu voyaient ces quatre noms, ensemble, atteindre les demi-finales…

Franchement oui, très peu. Les gens voyaient la Côte d’Ivoire comme un favori, mais pas de cette manière-là. Vu les dernières campagnes du Nigéria, personne ne l’attendait aussi loin. En plus, juste avant le début de la Coupe d’Afrique, ils perdent Wilfred Ndidi, leur milieu de terrain clé, puis Victor Boniface. Sans ses deux joueurs, José Peseiro a dû changer de dispositif. Cela a rééquilibré toute l’équipe, mis en avant Victor Osimhen et les ailiers, tout en donnant à l’équipe une meilleure assise défensive. Je voyais la RDC et l’Afrique du Sud aller jusqu’en quart. La surprise a fait que les tableaux ont été bouleversés.

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Pour Mansour Loum, l’homme de cette Coupe d’Afrique est Emersé Faé © Icon Sport

Qui est l’homme de cette Coupe d’Afrique ?

C’est Emersé Faé. Ce n’est pas un cadeau empoisonné, mais c’est étrange. En étant adjoint, ça se passe bien. Le coach (Jean-Louis Gasset) abandonne avant que l’équipe soit abandonnée, et on lui donne le poste. Entre-temps, on veut lui faire un enfant dans le dos, en sollicitant Hervé Renard en prêt. Je suis Emersé Faé, je me dis “je suis un bouche-trou”. Ça ne marche pas comme ça. Peut-être qu’heureusement il n’est pas venu, car tu aurais pu perdre face au Sénégal. L’homme de cette CAN, c’est lui. Il a apporté un état d’esprit.

Il y a un joueur qui me marque et qui, justement, n’a pas marqué : Victor Osimhen. Il fait une Coupe d’Afrique, sur le terrain, qui est hallucinante. C’est le premier à montrer l’exemple. En demi-finale face à l’Afrique du Sud, il est malade et blessé. En le voyant, à aucun moment tu te dis qu’il est dans cette situation. Quand ta star se met au service du collectif, en étant son coéquipier, tu ne peux pas faire moins que lui. C’est peut-être ce qui fait que le Nigéria soulèvera le trophée.

Et au contraire, de qui pouvons-nous le plus être déçu après cette 34e édition ?

Je suis déçu de Riyad Mahrez. Je m’attendais à ce qu’il soit plus revanchard et leader. Cela ne s’est pas forcément ressenti. Il n’a pas su tirer son équipe vers le haut, c’est dommage. On s’attendait à ce que les stars brillent et apportent un plus, lui, il n’a fait ni l’un, ni l’autre.

Il reste sur deux CAN assez décevantes. Sadio Mané ne fait pas une grande CAN, d’ailleurs, normalement, ça aurait dû très mal se finir avec un carton rouge.

Qui est votre favori pour cette finale ?

Cette finale contre le Nigéria va être une revanche. Ils ont leur chance et je pense que ça sera un match ouvert. L’histoire est tellement belle que je ne vois pas comment elle pourrait se terminer sans une victoire de la Côte d’Ivoire. Ça me rappelle quand l’Arabie saoudite bat l’Argentine et que tout le monde se moque de cette défaite. Un mois plus tard, elle est championne du Monde.

Peu importe comment ça commence, l’important, c’est d’être à l’arrivée. Et la Côte d’Ivoire y est. Toutes les planètes sont alignées. Cette équipe est en train de planer. Ils reviennent de tellement loin. C’est l’histoire de cette Coupe d’Afrique qui veut ça. Mais j’espère que les joueurs ne se diront pas ça, car il faut tout de même jouer le match.

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