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·16 janvier 2025

EXCLU - Louna Ribadeira : « La pression et l’adrénaline, ça m’anime ! »

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À tout juste 20 ans, Louna Ribadeira affiche déjà énormément de vécu. De ses débuts éblouissants avec le Paris FC à une saison blanche à cause de blessures, puis un retour XXL pour finalement signer à Chelsea, l’attaquante, élue meilleure espoir de D1 l’an dernier, a des histoires à raconter.


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« Je ne voulais pas jouer avec des poupées »

Quel est ton premier souvenir avec un ballon rond ?

Ça remonte à longtemps. Le premier truc qui me revient, c’est avec mon père, un ancien joueur de football. Il voulait un garçon pour jouer au football, c’était son rêve. Du coup, il m’a tout de suite mise sur un terrain avec lui. À l’époque, je ne voulais pas jouer avec des poupées, je ne voulais que des ballons de football, dès l’âge de 2-3 ans. Je voulais être avec mon père à l’entraînement, aux matchs le dimanche matin. Quand on m’offrait des poupées, je les jetais !

Te rappelles-tu de ton premier entraînement ?

Oui, j’ai commencé le football à 6 ans dans le club de ma ville, le Benfica Yerres. Je viens d’une petite ville, on se connaît tous. Donc tous les garçons présents à l’entraînement, c’était aussi mes copains d’école. Qu’on joue ensemble à l’école ou le soir à l’entraînement, ça ne changeait rien. En plus, mon père est très vite entré dans le club en tant qu’entraîneur.

Étais-tu la seule fille ?

Au tout début, on était trois. L’une a rapidement abandonné. Quant à la seconde, Océane Ferreira, on a effectué tout notre parcours ensemble. Elle a intégré le Paris FC en même temps que moi, sauf qu’elle est directement allée au centre du PFC tandis que moi, je suis allée à Clairefontaine tout en restant en club au PFC. Elle a ensuite poursuivi à Saint-Maur, moi je suis restée dans la capitale.

Comment s’est opérée cette arrivée dans ce club ?

Au début, c’était en lien avec l’INSEP et Clairefontaine, donc je n’y allais que le week-end. Il y avait les filles du pôle ensemble d’un côté et celles du Paris FC de l’autre. Ça peut créer quelques différences. Ensuite, quand j’ai intégré le groupe professionnel, j’étais encore à Clairefontaine. Je le quittais le mercredi soir pour revenir le lundi. Ma coach Sandrine Soubeyrand voulait que je m’entraîne un minimum la semaine pour être plus performante le week-end. Il pouvait y avoir un petit décalage, car je n’avais qu’un entraînement ou deux avec les professionnelles, c’était compliqué de créer des liens.

Comment as-tu géré tout cela ?

J'avais du mal à m’en rendre compte. Ce que je voulais à cette époque, c’était juste signer et jouer au football. Pour la saison 2021-2022, il fallait jongler avec les cours, car c’était l’année du Baccalauréat, et la D1. Malheureusement, je devais rater beaucoup de cours, j’avais tout juste 17 ans. J’avais très peu de temps pour moi, mais tu ne réalises pas, c’est les plus belles années, car tu joues avec insouciance.

Surtout que tout a bien commencé pour toi. En août 2021 : premier match comme titulaire contre Guingamp, une passe décisive et un but…

Oui, passe décisive au bout de 30 secondes pour Clara Matéo et ensuite je marque mon but. La pression et l’adrénaline, ça m’anime ! Quand on me met sur le terrain, il faut que je montre à mon entraîneur qu’elle ne doit pas regretter. Je voulais absolument montrer ça pour ma première titularisation. En tant qu’attaquante, on est jugées sur nos statistiques. Il fallait que je prouve, en marquant ou en aidant l'équipe à marquer. Avec une passe décisive, ça me permet de jouer libérée. Avant tout, ça reste un plaisir.

Comment gères-tu cette pression ?

Je ne me pose pas trop de questions. Je rentre avec l’envie de prendre du plaisir, rendre fiers mes proches, car ils m’ont tout donné. Mon père est très exigeant avec moi. Son avis compte énormément. Il faut que je sois performante, mais ça m’arrive de faire de mauvais matchs.

Après ce match contre Guingamp, tu te dis que c’est possible de vivre du football ?

C’est à ce moment-là, oui. C’est une question que j’ai déjà posée à mes parents. Ils m’ont dit qu’à partir du moment où je suis arrivée au Paris FC, c’était déjà différent. Car quand j’ai commencé le football à Yerres, on ne connaissait pas trop le monde du football féminin. Ça n’était pas encore assez développé. Et quand j’ai intégré le PFC, ils ont vu que j'avais une carte à jouer là-dedans.

Et ce premier but lance la machine !

C’est difficile de réaliser sur le moment, mais quand tu as 17 ans et que pour ton premier match, tu fais une passe décisive et tu marques un but, les gens t’attendent, commencent à parler de toi. Ça peut être positif comme négatif. Tu as tout de suite cette pression, ça peut te monter au crâne. Tu peux éprouver beaucoup de sensations. Personnellement, je me dis toujours que je n’ai encore rien fait, que je ne suis personne, que le plus dur arrive.

Surtout en passant de l'ombre à la lumière en un seul match, n’est-ce pas ?

L’entourage est très important dans ces moments-là. On est une famille très humble, dans le travail. Mes parents m’ont toujours aidée, félicitée, tout en me prévenant que j’allais être encore plus attendue. Il y a des dizaines de filles qui ont pu performer à leurs débuts, et on ne les a plus jamais revues. Il faut faire attention, c’est un monde de requins, tout ça peut monter à la tête.

Quelles sont les joueuses qui t’ont aidée à ce moment-là ?

Celle qui m'a aidée, et que je considère toujours comme ma grande sœur, c’est Annaïg Butel. Elle m’a tout de suite prise sous son aile. Ça a été très fort rapidement. Elle s’est retrouvée à travers moi, elle qui a fait ses débuts très jeune. Ça a été comme un mentor, même si on ne joue pas au même poste. Mentalement, c’est et ça a toujours été une personne qui m’a beaucoup aidée.

Après un premier exercice encourageant, tu signes ton premier contrat professionnel à l’été 2022, puis tu enchaînes les blessures avec une saison quasi blanche. Tu as douté ?

Honnêtement, c’était très compliqué. Je dois faire l’Euro U19 avec les Bleues, mais je me blesse lors du deuxième match. Je l’avais préparé, j’étais capitaine… La coach avait placé beaucoup d’espoir en moi. Je me suis blessée à l’orteil, et le problème, c’est qu’il existe toujours une incertitude sur la disparition de la douleur. Je devais donc jouer comme ça. Mentalement, c’était dur. Je savais que je n’étais pas performante, un peu malgré moi. Je reviens en novembre, et je me fais une rupture du ligament de la cheville en décembre. En quelques mois, je suis passée de la lumière à l’infirmerie. Les gens ont pu se dire que mes débuts étaient liés à la chance. Ça m’a aussi permis d’apprendre sur moi. Je savais que j’allais me relever, mais il fallait savoir comment.

As-tu eu peur que tout s’arrête ?

Non, car mon entourage est là pour m’aider si ça ne va pas.

Tu as changé des choses dans ton quotidien ?

Oui, énormément. Moi, je vis chez mes parents. Mes parents ne vivent pas uniquement pour moi. Si j’habitais seule, ça serait différent. Mais à la maison, on est quatre. Par exemple, quand il y avait certaines sorties familiales, je refusais, pareil quand ils mangeaient un fast-food. Il faut savoir se fixer des règles plus strictes. Même aujourd’hui, c’est un peu compliqué à gérer. Il faut s’imposer cette exigence si tu veux en faire ton métier. Les clubs se développent, les filles aussi, il faut s’imposer à la fois techniquement, mais aussi physiquement.

Cette exigence a payé, car à la fin de ta saison galère, tu cartonnes tout à l’Euro U19 où tu termines meilleure buteuse et meilleure joueuse avec le brassard de capitaine. Tu t’en souviens ?

C’est une belle récompense. Lors de la saison galère, j’avais quand même coché l’Euro en fin d’année. C’était mon moment, le moment idéal pour rebondir. Je voulais gagner l’Euro collectivement, mais je voulais aussi terminer meilleure joueuse et meilleure buteuse. Je me suis préparée pour ça, je voulais être armée physiquement et avoir confiance en moi techniquement. Je suis arrivée complètement relâchée, j’étais prête, la coach avait confiance en moi et tout s’est bien passé.

Avais-tu de l’appréhension, l’impression que ça pouvait être un tournant de ta carrière ?

Clairement, ça pouvait relancer quelque chose. Les compétitions internationales font changer les idées des coachs. Quand tu passes une année blanche, et que la coach regarde la compétition et te voit performer, elle peut rapidement te faire confiance à nouveau.

« C’est le rêve de mon père qui se réalise »

Et ça a été le cas avec une grosse saison 2023-2024…

Je reviens de l’Euro et on a tout de suite les barrages de Ligue des Champions. Mathilde Bourdieu réalise un gros début de saison, je devais prouver sur mes entrées en jeu. Et il y a ce match contre Le Havre. Je suis sur le banc, je rentre et j’inscris un triplé (le Paris FC est mené 2-0 avant de finalement l’emporter 3-2), je reprends confiance en moi.

As-tu senti que ton statut avait évolué au cours de cette saison ?

Pas forcément. J’aime bien rester à ma place. Je reste l’un des plus jeunes dans le vestiaire. Je suis assez sociable, assez bonne vivante, j’essaye de garder cette fougue et cette innocence, tout en étant mature. J’ai ma place dans le vestiaire, mais je ne veux pas me prendre pour n’importe qui dès que je commence à marquer.

Tu es plutôt du style chambreuse quand même ?

Honnêtement, je ne suis pas la chambreuse, mais j’aime bien rigoler, jouer, m’entraîner dans une bonne ambiance. J’essaie de toujours apporter des ondes positives. Il y a des périodes où c’est plus compliqué, donc je tente d’apporter cette bonne humeur.

Quelles sont les plus grosses chambreuses du vestiaire ?

Il y en a pas mal ! Margaux Le Moël, Gaëtane Thiney, il y en a beaucoup !

Quel moment t’a le plus marqué durant cette saison 2023-2024 ?

Sans aucun doute, le tir au but gagnant face à Arsenal (le Paris FC s’est qualifié pour le deuxième tour de qualification de la C1 féminine en battant Arsenal aux tirs au but). C’est la plus grosse émotion que j’ai ressentie dans le football. On gagne 2-0, je rentre en fin de match et on se fait rejoindre 2-2. En prolongation, on mène à nouveau, mais on concède encore l’égalisation. Ça n’est pas possible de ne pas gagner ce match. La coach nous demande qui veut tirer les tirs au but. Je lève la main et je suis désignée cinquième. Chiamaka Nnadozie (gardienne du PFC) avait déjà détourné deux tentatives, je devais absolument le mettre. L’innocence, l’adrénaline, un mélange de plein de sentiments à ce moment. Et quand tu vois la joie des filles ensuite, ça n’a pas de prix.

Tu t’es imaginée le rater ?

Non, jamais, on ne peut pas s'imaginer ça ! Quand j’étais jeune, je ratais tout le temps les penalties. Un jour, mon père m’a dit que ce n’était plus possible. On a commencé à faire des séances avec 50 tentatives. Et c’est devenu une de mes forces. Je peux tirer à gauche ou à droite, sans pression. C’est une technique de frappe comme une autre. J’avais analysé la gardienne sur les tirs précédents. J’avais vu qu’elle ne plongeait que d'un côté. Et ça a marché.

En plus de toutes ces émotions, tu es aussi récompensée par une première convocation en équipe de France. Qu’as-tu ressenti ?

Je n’arrivais pas à réaliser. Je ne comprenais pas trop ce qui m’arrivait. Tout a commencé à la fin de l’année et les play-offs. Mon nom et celui d’Inès Benyahia ont circulé. Mais quand je suis arrivée au château, j’ai commencé à comprendre. On est dans la cour des grands, plus celle des petits avec les bâtiments à côté du vrai château.

Premier match, première victoire face à l’Angleterre à Newcastle, tu réussis particulièrement tes premières, n’est-ce pas ?

Oui, même si j’ai vécu ça différemment, car à ce moment, j’ai déjà des problèmes à mon genou. Quand j’ai rejoint la sélection, je voulais prouver que ça n’était pas pour me récompenser, mais pour montrer que j’avais une vraie carte à jouer. Sauf que mon genou gonflait toujours. Je voulais, mais je ne pouvais pas. Malgré moi, mon genou ne suivait plus le rythme. Ça crée de la frustration. Ça me freine clairement et ça me pèse. Je sais que j'aurais pu aller aux Jeux Olympiques.

Justement, ces JO, tu dois finalement les regarder depuis ta télévision à cause de cette blessure. Tu as quand même réussi à regarder les matchs ?

Oui, j’ai pu les regarder. J’ai quand même fait une partie de la préparation. J’avais bien accroché avec certaines, on a continué à s’écrire, à prendre des nouvelles, même avec le staff médical. J’étais l’une des premières fans.

Malgré cette absence aux Jeux Olympiques, tu as quand même vécu un été mouvementé avec ta signature à Chelsea, puis ton prêt dans la foulée. Peux-tu nous raconter ?

Je savais que j’arrivais dans la dernière année de mon contrat avec le Paris FC, que ça serait donc l’année la plus importante : soit je prolongeais, soit je partais. Il fallait faire une bonne saison quoi qu’il arrive. Quand je quitte le stage des Bleues, je pars en vacances et mes agents m’appellent pour me dire que Chelsea a posé une offre. Au début, tu n’y crois pas, Chelsea, c’est un trop gros club. Il y a des questions qui se posent, puis c’est une période de transferts avec des discussions, etc. C’est long, tu cogites, tu te remets en question, tu te dis que c’est trop tôt, tout se mélange. Tu as beau être conseillée, entourée, le dernier mot, c’est quand même le mien.

Le fait que Sonia Bompastor soit à la tête de l’équipe, ça a joué ?

Au début des négociations, elle n’était pas encore officiellement coach. C’était dans les tuyaux, mais pas encore officiel. Dans le même temps, il y avait d’autres opportunités. À la fin du match face au PSG l’an dernier, le directeur sportif était venu me parler. Il faut faire le bon choix. Suis-je prête à quitter la région parisienne, aller dans un autre pays, découvrir une nouvelle culture ? C’est beaucoup de questions. Mais quand Sonia a été annoncée, elle m’a contactée pour me confirmer son intérêt. C’était un repère même si je ne la connaissais pas particulièrement. Ça a aidé, oui, même si c’était un tout. Je suis une personne ambitieuse et Chelsea ambitionne d’être le meilleur club du monde. Cette année, elles peuvent gagner la Ligue des Champions.

Et tu as aussi cette continuité avec le prêt au Paris FC.

C’est parfait, tu ne changes pas du tout au tout. Je ne réalise toujours pas que je suis à Chelsea. C’est une manière de s’habituer tout doucement à ce changement. Quand il faudra partir à Chelsea, je partirai.

Tu ne réalises pas, mais quand on foule la pelouse de Stamford Bridge pour faire un shooting photo, ça aide je suppose ?

Oui, mes parents étaient avec moi à ce moment-là, ils étaient émerveillés. C’est le rêve de mon père qui se réalise. C’est la plus belle des fiertés. C’est un stade mythique du football. Tout rêveur de football s’imagine un jour être là-bas. Si je ne suis pas contente, c’est qu’il y a un problème.

Quels sont les domaines dans lesquels tu vas devoir progresser avant d’arriver en Angleterre ?

Déjà, je travaille à côté en plus des entraînements pour être prête physiquement et athlétiquement à répéter les efforts, résister aux matchs à haute intensité. Au niveau de l’agressivité, des duels, ça envoie ! Et devant les buts, l’efficacité sera la clé : un tir, un but. Tout vient ensuite, s’habituer à une nouvelle équipe, un nouveau schéma de jeu, de nouvelles personnalités.

Tu parles déjà un peu anglais ?

Je me débrouille, je vais me perfectionner, mais je ne suis pas à plaindre !

Quelles sont les joueuses qui t’impressionnent à Chelsea ?

Forcément, on pense à Samantha Kerr. Mais ça n’est pas la seule, il y aussi des joueuses comme Lauren James, Aggie Beever-Jones. Elle me ressemble un peu. Une jeune dans un bon club et qui veut se faire sa place. Mais forcément, Sam Kerr, c'est l’idole du football féminin.

Certains médias ont même dit que Chelsea te recrutait pour préparer l’après-Sam Kerr !

Oui et non. On ne joue pas du tout dans la même cour. Sam Kerr, ça reste l’une des meilleures attaquantes du monde. Je vais essayer de prendre un maximum d’elle, de m’en inspirer. Mais on a quand même deux styles différents. Je reste Louna Ribadeira, je ne dois pas changer ma façon de jouer.

T’es-tu fixée des objectifs avant de rejoindre l’Angleterre ?

Individuellement, marquer plus de buts que l’an dernier (huit buts en 2023-2024). Je me suis aussi fixée d’aller faire l’Euro avec les A. Et avec le Paris FC, terminer le plus haut en championnat et décrocher la Coupe de France !

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