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·21 juillet 2025
EXCLU - Jean-Mattéo Bahoya : « J’ai trouvé le bon équilibre dans ma vie »

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·21 juillet 2025
Pour sa première saison en complète en Bundesliga, Jean-Mattéo Bahoya a « cassé » la baraque. Ses fulgurances ont marqué l’ensemble des observateurs allemands. Au point de devenir le joueur le plus rapide de l’histoire de la Bundesliga (flashé à 37,16 km/h). Avant de rejoindre l’équipe de France espoirs, « JM » nous a accueillis sur la terrasse de l'immeuble de son équipementier pour raconter sa trajectoire ascendante. Entretien avec un garçon à la tête bien faite.
Voici quelques extraits de notre interview de Jean-Mattéo Bahoya. L’intégralité de cet interview de 6 pages est à retrouver dans le magazine n°373 de Onze Mondial disponible en kiosque et sur notre eshop depuis le 14 mai 2025.
Enfance
Comment s’est déroulée ton enfance ?
Je suis né à Montfermeil, j’ai grandi avec mes deux parents, j’ai connu une enfance lambda. On a déménagé à Angers lorsque j’avais cinq ans. Mes parents ne voulaient plus habiter en région parisienne, ils voulaient être dans une ville plus calme, plus plaisir. Ils ont choisi Angers pour la douceur angevine (sourire). Dès mon arrivée là-bas, j’ai commencé le foot. Mon père est diagnostiqueur immobilier, ma mère travaille dans des laboratoires. J’ai un grand frère et un petit frère. À la maison, il y avait beaucoup de compétition entre nous. On était des compétiteurs, ça criait souvent quand on perdait. Mais sinon, nous étions sages.
Tu étais quel type de garçon ?
J'étais le garçon plutôt calme et timide. J’avais toujours un ballon aux pieds et je voulais tout le temps jouer au foot. À l’école, c’était compliqué. Je voulais juste jouer au foot et je négligeais l'importance de l'école. Et dès que j’ai commencé à la formation, avec un emploi du temps aménagé entre le foot et l’école, tout s’est mieux passé. J’ai d’ailleurs eu mon bac STMG avec mention bien.
As-tu une anecdote sur ton enfance ?
Je peux te raconter une histoire qui montre comment je pouvais être chiant quand j'étais petit, parce que j'étais un compétiteur. En U11, on avait des tests de jongleries, il fallait faire 50 jongles du pied droit, 50 jongles du pied gauche et 20 jongles de la tête. Je n’étais pas bon avec mon pied gauche. Donc j’allais au terrain avec ma mère, elle m'accompagnait juste pour jongler. Et sur le chemin retour, si je n’avais pas réussi à faire 50 jongles du gauche, je ne lui parlais pas, car j’étais énervé contre moi-même. Ma mère me laissait tranquille, elle savait qu’il fallait que je me calme. Elle me connaissait par coeur, et ça m’a beaucoup aidé. On en a reparlé récemment.
Tes parents aimaient le foot ?
Pas tant que ça. Mon père était branché sports de combat, ma mère ne s’intéressait pas trop au sport. Ils ont commencé à suivre le foot à cause ou grâce à mon grand frère. Aujourd'hui, avec mon petit frère et moi, c'est plus facile pour eux parce qu'ils sont beaucoup plus impliqués.
Pourquoi le foot du coup ?
Par rapport à mon grand frère, un grand fan de foot, il a toujours voulu jouer au foot. Il a arrêté récemment, mais c'était un fan. Il mettait toujours les matchs à la télé. Mon père s'énervait, il y avait toujours du foot à la télé. Voilà comment mon envie est venue.
Tu as essayé d’autres sports ?
J'ai essayé le judo, j'ai essayé le basket, mais je faisais toujours ça en parallèle du foot. C'était le foot et peut-être un autre sport. Au bout d'un moment, j’ai fait un choix.
Quel a été ton premier club ?
J’ai commencé à Champtocé, un petit club proche d’Angers. Je me suis inscrit tellement tôt que je ne pouvais pas faire les matchs. J’ai dû attendre avant de faire de la compétition. J’ai ensuite été à Trélazé puis Andard Brain. Et j’ai fini par rejoindre le SCO à l’âge de 10 ans. J’ai fait mon école de foot et ma préformation à Angers.
Formation
Comme tu habitais à Angers, tu ne dormais pas au centre de formation ?
Exact. Je ne sais pas si c'est une chance ou pas, en tout cas, j'ai pu rester avec ma famille. Et jusqu'à aujourd'hui, je suis reconnaissant de ça. J'avais mon cocon, je connaissais déjà la région, la ville, j’avais mes amis. C’était forcément un avantage d’être au SCO durant toute ma jeunesse.
Des gens ont marqué ta formation ?
Oui, de nombreuses personnes. Je pourrais te citer de nombreux joueurs, mais aussi des coachs qui m'ont permis de prendre confiance en moi, parce que je savais que j'étais un bon, mais j’ai aussi connu des moments de doute. Et là, les coachs m’ont dit que je pouvais aller très loin et qu’il fallait juste que j'en prenne conscience.
Tu as des anecdotes sur ton passage à la formation ?
J'en ai tellement ! J’ai de bons souvenirs et des moins bons. La meilleure, c’est ma saison en U17, on arrive en play-off, et je fais une saison qui fait parler de moi en termes de statistiques. Grâce à cette saison, j’ai pu atteindre le monde professionnel. J’ai aussi eu des moments de doute en U12/U13, j’étais un compétiteur et quand ça n’allait pas, j’étais prêt à arrêter le foot. Mais je ne regrette rien, c’est grâce à tout ça que je suis là aujourd’hui.
Pourquoi tu voulais arrêter ?
Quand on n'y arrive pas et qu'à 12 ans, une équipe compte sur toi, tu n'es pas prêt à ça. Par exemple, quand on était en tournoi, si on se faisait éliminer, pour moi, ce n'était que de ma faute. Je n'arrivais pas à mettre la responsabilité sur le dos de quelqu'un. C'étaient des moments compliqués. Heureusement, je vivais encore à la maison, avec ma famille, mes parents m’expliquaient les choses, ils me disaient : « Ce n’est pas de ta faute, tu n’as que 11 ans, tu joues pour t’amuser, il ne faut pas te tuer le moral comme ça ». C’était un mindset, un esprit qui est bon pour un compétiteur, mais qu’il fallait réguler quand même. On ne peut pas être que dans le négatif.
Comment faire pour sortir du lot face à la concurrence ?
Il faut du talent, du travail et de la chance aussi. De la chance parce que j'ai beaucoup travaillé. J'ai un don naturel, mais j'ai aussi eu ce facteur chance. J’ai atteint le monde professionnel parce que Gérald Baticle est venu me voir à un match de Gambardella, j’étais U17. Je jouais simplement les matchs de Gambardella avec les U19. Il m’a vu et il a dit : « Pourquoi on ne m’a pas parlé de ce gamin, je veux qu’il s’entraîne avec moi ». Voilà comment j’ai atteint le monde professionnel et comment j’ai signé mon premier contrat pro.
Lors de ta grosse saison en U17, tu étais très courtisé, comment as-tu géré la situation ?
J'avais déjà mon agent et mes parents. Ils m'ont tellement coupé de tout ça que je n'étais même pas au courant. Mes parents n'ont pas choisi à ma place, ils ont simplement fait le tri entre ce qui était positif pour moi et ce qui ne l’était pas. Pour eux, la meilleure option était de rester au SCO. J’avais grandi dans ce club, je connaissais tout le monde. En plus, je connaissais la ville. Je n’étais pas prêt pour aller à l’étranger. Je n’avais que 16 ans. Sans mes parents, ça aurait été compliqué. J’ai donc fait le meilleur choix.
Angers
Tu as signé professionnel très jeune, était-ce une formalité ?
Franchement, non, ce n’était pas une formalité. Avant le début de saison U17, vraiment pas. J’avais du talent, mais il fallait montrer d’avantage pour passer un step. À la fin de l'année, oui, c’était « normal ». Les gens parlent, les agents viennent te voir, les recruteurs aussi. Donc tu te dis : « OK, je suis en train de faire quelque chose de bien ». Mais au départ, non, ce n’était pas une formalité. Ça l’est devenu après.
Comment imaginais-tu ton premier match professionnel ?
Bonne question. Comme tout le monde, j'aurais voulu entrer en jeu et marquer un but, mais je n'ai pas eu cette expérience-là. Mais elle était tout autant exceptionnelle. J’ai vécu tellement d'émotions, beaucoup de stress aussi parce qu'on a envie de bien faire. Mais c'était quelque chose de fou. On a perdu le match, malheureusement, mais moi je suis rentré chez moi, j'étais tellement content et fier de ce que j'avais fait. J'attendais juste le prochain match pour jouer à nouveau (sourire).
Comment as-tu géré tes premiers entraînements avec les pros ?
Dans mon tempérament et dans ma personnalité, je suis quelqu'un de très réservé, qui observe d'abord. Donc je suis venu, je n'ai pas fait beaucoup de bruit, j'ai observé comment ça fonctionnait et j'ai appris. On apprend forcément en jouant avec de bons joueurs et des joueurs expérimentés. J'ai pu me mettre au niveau professionnel au fil du temps.
Tu n’as pas eu peur de provoquer les anciens en un contre un ?
Non. Ce n'était pas quelque chose qui était mal vu au SCO. C'était quelque chose qui était courant. Il y a toujours eu des dribbleurs comme Sofiane Boufal, Azzedine Ounahi, Mohamed-Ali Cho. Donc non, ce n'était pas quelque chose d'exceptionnel. Ça ne m'a pas freiné car les autres le faisaient.
Comment s’est passée ta première titularisation face au PSG ?
Bon souvenir. Quand tu as 17 ans, tu peux affronter Messi, Mbappé, Sergio Ramos pour ta première titularisation professionnelle, c'est incroyable. En plus, on fait un bon match, même si on perd. J'ai gardé beaucoup de bons souvenirs. C'est un moment marquant dans ma carrière, forcément.
Comment on prépare ces gros matchs-là ?
Ce match-là, je me rappelle que le coach m'avait prévenu un peu à l'avance. Trois, quatre jours avant, j'étais déjà au courant. Ça m'a permis de me mettre directement dans mon match. Je me suis dit : « Ok, dans quatre jours, tu es titulaire. Comment tu vas t'y prendre pour être le plus performant possible ? ». J’étais concentré, j’avais envie de jouer. Le stress monte forcément, mais c'est quelque chose dont j'ai besoin, pour être performant.
Comment tu t’es adapté au monde professionnel ?
J'ai eu besoin de temps. Car avant de l’appréhender dans la tête, il fallait que je l'appréhende physiquement aussi. J'étais très frêle, très petit, donc il fallait que je m'étoffe. Et ça n’arrive pas du jour au lendemain, j'ai dû bosser. J'ai réalisé six bons mois à la salle de muscu pour m'étoffer. Et après, mentalement, on observe, on voit comment ça marche. On essaye de ne pas manquer de respect aux gens, mais on essaie de montrer ce dont on est capable et d’être performant.
Tu t’es vite adapté, comment expliques-tu cela ?
Je n'ai pas une vraie recette. J'ai réussi à être performant quand on m'a donné des minutes. Pourquoi ? Parce que j'ai réussi à être bon dans les bons moments. J'arrivais à entrer et à amener un plus à l'équipe. J’apportais de la fraîcheur, du dynamisme. J'ai un petit regret, c'est de ne pas avoir été titulaire plus régulièrement. J’aurais aimé montrer plus de choses aux supporters. Je suis parti, c’était bien pour le club et pour moi. Je garde seulement du positif du SCO .
Eintracht Francfort
L’Eintracht Francfort a misé de l’argent sur toi. Tu avais la pression ?
Pas la pression, ni une crainte mais une appréhension. C'était la première fois que je quittais Angers. J’allais découvrir un nouveau club, un nouveau pays. Je savais que j’allais me retrouver dans un vestiaire avec des noms. Il fallait s’adapter, comme à Angers, j’ai observé et regardé le fonctionnement des autres. Ça m'a permis d'enlever cette appréhension et de me lâcher au fil des mois. Au début, c'est forcément particulier. Tu dois apprendre une nouvelle langue, tu ne comprends pas vraiment ce que les gens disent, ce qu'on attend de toi. Ce n'est pas le plus évident, mais il faut s'adapter.
Tu as signé rapidement à Francfort, pourquoi ce choix ?
J'avais la possibilité de rester au SCO et ça ne m'aurait vraiment pas dérangé, au contraire. J'aurais pu vivre une montée avec mon club formateur, ça aurait été une expérience extraordinaire. Mais le projet de Francfort était celui qui me convenait le plus et qui, pour moi, pour ma progression, était le plus adéquat. J'avais un projet clair, je savais ce qu’on attendait de moi. La direction et le staff de Francfort ont été parfaits avec moi. Je savais que je n’allais pas être titulaire dès mon arrivée, on m’a laissé six mois d'adaptation et ensuite, on m’a intégré petit à petit.
De nombreux Français ont réussi en Allemagne, était-ce rassurant ?
Oui, ça a joué, forcément. J’avais l'exemple qui était très récent de Kolo Muani à Francfort. On avait les exemples de Ribéry, de Coman aussi. Ça aide, tu te dis « Pourquoi eux peuvent le faire et pas moi ? ». J'ai aussi du talent. Donc forcément, c'est quelque chose qui m'a poussé à aller en Allemagne.
Les dirigeants t’ont parlé de ça pour te convaincre ?
Évidemment et ça m’a convaincu. Un autre point important, le coach parle français, avec un vestiaire composé de nombreux joueurs francophones. Donc quand on sort d'un championnat français, c'est très bien de retrouver un environnement qu'on connaît un petit peu.
Comment as-tu géré ton adaptation, le changement de niveau, l’intensité, les attentes différentes ?
Oui, il y a eu beaucoup de changements parce qu'on change de dimension au niveau du club. J'étais dans un club où l’objectif était le maintien, je suis passé dans un club où on joue la Coupe d’Europe et où on a l'habitude de gagner. Donc c'est une mentalité différente. Comment on s'adapte ? On apprend vite. Il faut beaucoup courir. J'ai dû progresser sur ça parce que j'avais des qualités de vitesse, de fulgurance, mais en termes d'endurance et physiquement, j’avais des manques. J'ai dû bosser sur ça. Je pouvais faire des minutes de qualité en Allemagne, mais je ne pouvais pas faire un match dans son intégralité. J’ai fait du travail supplémentaire avec les préparateurs physiques pour être au niveau.
Des choses t’ont choqué ?
Rien ne m’a choqué. Étonné, c'est juste qu’on travaille plus quand même. C'est beaucoup plus physique, il y a plus d'intensité. On doit beaucoup plus sprinter, que ce soit offensivement ou défensivement, c’est le style de jeu du championnat qui veut ça, il est basé sur du pressing et des contre-attaques assez directes. Voilà ce qui a changé.
Comment ont été les Français de l’effectif avec toi ?
Quand je suis arrivé, je ne parlais même pas un bon anglais. Donc honnêtement, je ne pouvais parler qu'avec eux et le coach, donc ils m'ont tellement apporté. Ils étaient mes traducteurs, ils m'ont appris comment ça fonctionnait dans le vestiaire, ils m’ont montré le chemin à suivre pour être performant, parce que c'est tout un processus. Je suis reconnaissant de tout ça.
Parle-moi de ta connexion avec Hugo Ekitike…
Ce n'est pas compliqué d'avoir une bonne entente avec lui. C'est un joueur très performant, il sent le foot. Avec des joueurs comme ça, franchement, c'est facile de combiner et de se trouver. C'est quelqu'un qui mérite ce qu'il lui arrive. Il a fait une très grosse saison.
Comment tu l’as senti ? Revanchard ?
Un état d’esprit revanchard, oui. Mais pas dans le mauvais sens du terme, il ne voulait se venger de rien du tout. C’est juste un compétiteur, il a envie d’être au plus haut niveau. Donc revanchard contre lui-même. Et avec moi, il m'a pris comme son petit frère. On est arrivés en même temps, donc on a fait pareil, on a passé notre mois à l'hôtel ensemble. C'était un peu compliqué. Il m'a donné pas mal de conseils parce qu'il sait comment fonctionne le haut niveau. Et encore aujourd'hui, il m'apprend des choses. Je suis très content d'avoir Hugo dans mon équipe et j'espère qu’il va rester (sourire).
Ton rôle a changé dans l’équipe après le départ d’Omar Marmoush, comment as-tu vécu ce changement de dimension ?
C'est vrai, Omar prenait beaucoup de place. C'était notre joueur phare. Il est parti durant l’hiver. J’ai pu avoir plus de temps de jeu car ça a libéré un poste. Le club a recruté des joueurs, mais ils m'ont aussi donné ma chance. Je suis content, j'ai réussi à montrer que je pouvais être performant quand on me donnait du temps de jeu. À cet âge-là, c'est encourageant parce que ça montre que j'ai une bonne marge de progression et que je vais encore m’améliorer.
La marche n’était pas très haute ? Car tu étais le « successeur de Marmoush ».
Je ne voulais pas faire comme lui parce que je ne suis pas Marmoush, je suis Jean-Mattéo. Je ne me suis pas dit que je devais faire comme lui. J'allais apporter des choses différentes tout simplement, on est deux profils différents. Je ne me suis pas mis de pression. Je savais qu'on n'attendait pas que je sois Marmoush, on voulait que je sois performant et que j’aide l’équipe.
Tu as explosé le record de vitesse de la Bundesliga. Tu es devenu le joueur le plus rapide de l’histoire du championnat avec un sprint à 37,16 km/h…
Quand je finis le match, j'ai des petites interviews et on me parle directement de ce record. C’est marrant car lors de ce même match, j’ai marqué, mais tout le monde s’en foutait. Ils ne me parlaient que du record de vitesse (sourire). Ce n'est pas anecdotique parce que c'est un record. En plus de ça, c'est une qualité qui est tellement importante dans le foot aujourd'hui. Ça montre que je suis quelqu'un de rapide et c'est très bien pour moi. Mais après, je tiens à le souligner, je n'ai pas envie qu'on me catégorise comme un joueur seulement rapide ou athlétique. J’ai d’autres qualités à proposer.
Tu regardes tout ce qui se dit sur toi dans les médias ou sur les réseaux sociaux ?
Non, honnêtement, non. Dire que je ne vois pas, je mentirais parce que forcément, nos proches nous envoient certaines choses. Par exemple, ce record, tout le monde m’en a parlé. Mais je n’ai pas donné une grande importance à ce chiffre. Je n’ai pas commencé le foot en disant : « Je vais avoir le record de vitesse de la Bundesliga ». Je suis très content, mais je ne me lève pas le matin en me disant : « Je vais sprinter pour faire un nouveau record ». Moi, j’aime le foot et j'ai envie de toucher le ballon.
Ton frère évolue également à l’Eintracht Francfort, comment s’est organisée sa venue ?
Sa venue, je vais parler pour lui parce que selon moi, tout s'est bien passé. Lui est venu six mois après moi, il est venu avec mes parents. En début de saison, il s'est blessé, mais maintenant, il joue. Et franchement, il est très content, il apprécie la ville, le club. Je suis content parce que si mon petit frère est content, forcément, ça contribue à mon bonheur aussi. Je n'aurais pas voulu qu'il vienne ici et qu'il se sente malheureux, parce que j'aurais pu me sentir coupable. Honnêtement, je suis très content que tout se passe bien pour lui.
Quel est son niveau ?
Je le trouve très bon.Franchement, c'est un vrai bon joueur. Il joue latéral droit, il est rapide, solide, il est bon à la relance. C'est vraiment un bon défenseur qui peut jouer aussi central. Donc, profil à suivre.
L’idée serait d’évoluer ensemble ?
Exactement, moi à gauche, et lui à droite, il me ferait des transversales, ça serait pas mal. De temps en temps, je viendrais à droite pour le voir défendre tout seul (rires).
Vous vivez ensemble ?
Non, j'ai un appartement à Francfort et il y en a un autre pour ma famille. Pour moi, c'était important qu'en changeant de club, je prenne aussi mes responsabilités. Donc habiter tout seul, je pense que c'était la première bonne étape.
Personnalité
Qui est Jean-Mattéo ?
Je suis quelqu'un de joyeux, je rigole tout le temps, j’aime rigoler, je profite. Je ne me prends pas la tête, je vis au jour le jour. Donc normalement, Jean-Mattéo, si vous le voyez, il rigole.
Qu’aimes-tu en dehors du foot ?
Je joue à la play. Je joue à NBA, je joue à FIFA, à Call Of. Je joue avec mes frères. J’aime passer du temps avec mes amis. On passe notre temps libre ensemble, parfois on va juste boire un verre, on veut simplement passer du temps ensemble, partager de bons moments. Je n’ai pas de passion particulière en fait. Je regarde tous les sports, mais pas trop le football. J’aime bien la NBA, l’UFC… j’aime voir ce qui se fait dans les autres disciplines.
Tu n’es pas branché foot ?
Franchement, si, mais je ne suis pas le plus calé sur le sujet parce que j'adore le foot, mais je n'ai pas envie d'être en overdose. Donc quand je peux couper, j'essaie de couper au maximum.
Ça fait quoi d'être considéré comme un joueur prometteur ?
C'est quelque chose de bien, forcément. On est content quand on parle en bien de nous. Mais tu sais, entendre de bonnes choses ne me fait pas peur. Au contraire, ça me donne encore plus envie de confirmer, de montrer aux gens que je suis un joueur prometteur aujourd'hui et que demain, je pourrai le confirmer.
Tu n’as pas peur de ne pas réussir à répondre aux attentes ?
Franchement, non. Si je ne réponds pas aux attentes, ça sera tant pis. Au moins, j'aurais essayé et c'est la vie. Je n’ai pas de crainte à ce niveau.
Tu prends énormément soin de toi, au niveau de ton style vestimentaire et capillaire. Peux-tu nous l’expliquer ?
C’est un trait de ma personnalité venu sur le tard, j’aime les vêtements, les coupes de cheveux. J'aime ça et ça m'occupe pas mal en dehors du terrain. D’où ça me vient ? C’est une bonne question. J’en parlais toute à l’heure avec mes parents. Ça ne vient pas d’eux, donc je ne sais pas. Peut-être de mon grand frère, il aime bien la mode aussi. J'aime bien ce qui est joli. Et forcément, j’ai un petit faible pour les vêtements.
Comment tu choisis tes tenues, tes coupes de cheveux ?
Je cherche des inspirations un peu partout. Avec les réseaux, aujourd'hui, c'est facile pour trouver des coupes de cheveux. Quand je vois un TikTok ou un post Instagram, une belle coupe de cheveux, je me dis : « Allez, pourquoi pas ? Elle pourrait être bien ». Ou même mes frères me l'envoient et disent : « Cette coupe pourrait bien te convenir ». Ça vient de partout. Et parfois, j’essaie d’avoir un peu de créativité aussi. Ou sinon quand je vois sur quelqu'un et que je trouve ça beau, je n'ai pas de honte à essayer.
Et niveau mode, tu as des références ?
Chez les footballeurs, je peux te citer Hugo (Ekitike), il est très calé sur le sujet. Après, on a un mec encore plus diversifiant qui est Jules Kounde, il est vraiment super fort. Franchement, on a des Français qui sont bons et après, j'ai des références aussi hors football comme Shai (Shaivonte Aician Gilgeous-Alexander, meneur de jeu des Thunders d'Oklahoma City), le basketteur.
Tu vis seul, comment organises-tu ta vie ?
Je suis un solitaire, j’aime être seul par contre, de temps en temps, mes amis me rendent visite et ça me fait beaucoup de bien. J’aime être entouré par mes proches, ma famille. J’ai trouvé un bon équilibre. J’arrive à gérer mon sommeil, mes repas, car le midi, je n’ai pas besoin de me faire à manger. Et le soir, je cuisine, ça m’occupe. Je regarde les recettes sur internet et ma mère est trop forte, donc je lui demande quelques conseils (sourire).
Style de jeu
Comment définirais-tu ton style de jeu ?
J’aime beaucoup percuter, j’aime dribbler, mais aussi faire la passe. Pour moi, un bon joueur, c'est quelqu'un qui sait alterner les deux, qui sait faire l'un et l'autre quand il le faut. Voilà comment je me définirais et je pense avoir un bon profil.
Qu’aimerais-tu améliorer ?
J’aimerais améliorer mes derniers choix pour être encore meilleur en termes de statistiques. Le foot demande ça. Aujourd'hui, on passe du statut de « bon joueur » à « très grand joueur » grâce aux stats. Je dois progresser sur ce point, en plus, j’en suis capable. Il faut que je me le mette en tête et que j’arrive à le reproduire.
Qui sont tes modèles ?
Neymar. En tant qu'ailier, forcément, c'est une référence. C'est un joueur qui m'a marqué du fait de la beauté de son football et également parce qu'il a inspiré beaucoup de joueurs, que ce soit sur et en dehors du terrain. C'était vraiment une idole pour moi. Malheureusement, je n'ai pas pu jouer contre lui, mais ce n'est pas grave.
Tu parlais de stats, tu démarres chaque match en te disant : « Il faut que je state » ?
Oui, c’était le cas pendant un moment. Aujourd'hui, je travaille avec un préparateur mental, Pier Gauthier (ancien tennisman professionnel et ex-entraîneur de Gaël Monfils). Il me convainc que je ne dois pas me forcer à avoir de tels objectifs. Il ne faut pas que ce soit des devoirs. Je dois jouer mon jeu. Si ça arrive, ça arrive. Forcément, je serai très content, mais ce n'est pas une obligation. Je ne dois pas m'obliger à marquer, non. Je dois vouloir être bon, vouloir marquer, mais si ce n'est pas le cas, au moins, j'aurais essayé. Ce n'est pas quelque chose qui fera que mon match sera raté ou non. J'essaie de bien jouer, d'aider l'équipe et le résultat détermine si j’ai fait un bon match ou pas.
Pourquoi avoir pris un préparateur mental ?
Aujourd'hui, je trouve que c'est indispensable. Il m'a tellement apporté en termes de confiance ou même de rigueur. C'est un soutien que j'ai beaucoup négligé, pas dans le sens où je pensais que ce n'était pas nécessaire, mais dans le sens où on n'en parle pas beaucoup. Franchement, c'est un atout de taille parce qu'aujourd'hui, il m’aide tout autant qu'un préparateur physique ou qu'un membre du staff. Et c'est pour ça que je pense avoir trouvé le bon mélange
Comment ça se caractérise ?
On fait des séances une fois toutes les deux ou trois semaines, avec un bon suivi. Franchement, c'est un vrai plus. J'ai eu peur de m’ennuyer mais non, c'est quelque chose qui concerne mon quotidien. Donc forcément, ça m'intéresse. Et c'est un top gars. Honnêtement, je suis très content de travailler avec lui.
Tu as récemment été appelé avec l’équipe de France espoirs, tu te projettes avec les A ?
Honnêtement, moi, j'essaie de prendre les choses au jour le jour parce que le plus important, c'est quand même le club. Si je peux être dans des listes comme celle des espoirs, c'est parce que j'ai été performant en club. Donc, le plus important, c'est d'être régulier en club. Aujourd'hui, je suis en équipe de France espoirs. Si demain, l'équipe de France A fait appel à moi, je serai tout aussi content. Mais le plus important, c’est mes performances en club.
Tu as sûrement croisé Désiré Doué et Warren Zaïre-Emery chez les jeunes, ça doit te donner envie.
Oui, forcément, ça donne envie. Mais tout vient à point à qui sait attendre. Je suis très content pour eux. J'espère qu'ils resteront et mon heure arrivera peut-être. Donc, franchement, je ne m'inquiète pas.
Quand on voit la concurrence à ton poste, ça risque de ne pas être facile, n'est-ce pas ?
Ouais, forcément. Mais après, quand tu y es, c'est encore plus beau parce que tu sais que la concurrence est féroce et que tu fais partie de ces 23 joueurs. Ça me motive, ça ne me fait pas peur. Si demain je dois y aller, je serai le plus heureux du monde, mais aujourd'hui, je ne le suis pas. Et je suis quand même content parce que le plus important, c’est d’être bon avec mon club. Ensuite, ce sont des récompenses qui arriveront naturellement.
Conclusion
Tu as des rêves ?
Je rêve de porter le maillot de l'équipe de France un jour, je rêve de gagner un Ballon d’Or, je rêve de gagner une compétition majeure avec l'équipe de France. Après, les rêves, c'est fait pour se réaliser. Je donne tout au quotidien pour essayer de les atteindre. En dehors du foot, j'ai envie d'avoir une belle famille en bonne santé. C'est un rêve qui peut ne pas être très compliqué, pas très original, mais c'est le plus important dans la vie.
Si tu n'avais pas été footballeur, qu’aurais-tu fait ?
Bonne question. Je n'avais pas de plan B, mais j'aurais bien trouvé quelque chose qui m'aurait intéressé, où j'aurais pris du plaisir. Aujourd'hui, avec ma nouvelle passion qui est la mode, je te dirais ce milieu, mais sans avoir dans quel rôle.
Et si tu pouvais bénéficier d'un super pouvoir, tu choisirais lequel ?
Celui d'arrêter le temps, histoire de profiter encore un peu plus.
Si tu étais journaliste, tu poserais quelle question à Jean-Mattéo ?
Je lui demanderais : « Es-tu heureux ? ». Je répondrais : « Oui, je le suis aujourd’hui parce que j'ai trouvé le bon équilibre dans ma vie, je suis épanoui sur et en dehors du terrain. C'est comme ça que j'aime vivre et que je prends du plaisir ».
Pour terminer, quelle est la phrase qui représente Jean-Mattéo ?
Il faut profiter de chaque jour parce que mon père me répétait souvent : « La vie ne tient qu’à un fil, aujourd’hui, on est en vie, mais demain, on ne sait pas ce qui peut se passer ». Il faut donc profiter de tous les jours et ne pas avoir de regrets, voilà le plus important. Quand on vit avec des regrets, c’est compliqué. Aujourd'hui, j'essaie de vivre tout ce que je peux vivre et au moins, à la fin de ma carrière ou à la fin de ma vie, je pourrai dire que j'ai réalisé ce que je voulais. Et si je n’y parviens pas, au moins, j'aurai essayé.
Comment tu te notes pour cet interview ?
Je me mets 8 sur 10, je pense que j’ai été bon.
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