ENTRETIEN - Nicolas Maurice-Belay : “Quand tu joues aux Girondins de Bordeaux, tu ne peux pas avoir des résultats mitigés” | OneFootball

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·23 mars 2025

ENTRETIEN - Nicolas Maurice-Belay : “Quand tu joues aux Girondins de Bordeaux, tu ne peux pas avoir des résultats mitigés”

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Huit ans après son départ des Girondins de Bordeaux, Nicolas Maurice-Belay continue malgré tout à suivre le club au scapulaire. Le virevoltant ailier, au plus de 310 matchs de Ligue 1, se confie sur sa carrière.

187 matchs sous le maillot des Girondins de Bordeaux, une Coupe de France 2013 sous la houlette de Francis Gillot, Nicolas Maurice Belay incarne la dernière génération girondine titrée sur la scène nationale. À 39 ans, l’ancien joueur de Sochaux se livre sur les Girondins, mais pas que…


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WebGirondins : quel est ton premier souvenir en tant que joueur de foot ?

Nicolas Maurice-Belay : Mon premier souvenir, ce sont mes débuts à l’US Créteil. C’est là où tout a commencé. Moi, je garde de très bons souvenirs parce que je suis resté pratiquement toute mon école de foot à part deux ans où j'ai joué à Saint-Maur, mais c'est vraiment là où on m'a formé dans le football de la meilleure des manières, selon moi.

Tu intègres aussi l'INF Clairefontaine avec la génération 85. C'était une génération qui semblait hyper talentueuse.

On a été la seule à être championne de France de l'histoire de Clairefontaine, mais au final, nos carrières pros ne sont pas déroulées comme en jeunes. C'est-à-dire être fort, être dominant. C'est Jimmy Briand qui fait la meilleure carrière.

Après tu en as d'autres qui ont signé pro, mais qui ne se sont pas maintenus longtemps, soit en Ligue 1, soit en Ligue 2. Ils ont fait de belles carrières, mais pas sûr de la durée.

“Je vais en premier à Monaco visiter et quand je vais faire ma visite à Monaco, je ne dis pas qu’ils mettent le paquet, mais je fais mon retour en hélicoptère.”

Comment tu peux l'expliquer par rapport au niveau qu'il y avait en jeune ?

Mon explication, je pense que, quand tu grandis à Clairefontaine, tu grandis avec une idée très collective qui va beaucoup ressembler à des principes espagnols.

Dans le sens où le QI football, la qualité technique, la qualité de déplacement, la culture tactique sont mis en avant. Dès que chacun est parti dans un centre de formation, peut-être que tu tombes sur des clubs avec des coachs avec des pensées différentes, tu tombes aussi sur le côté individualiste que Clairefontaine ne t'inculquait pas. Je pense que ça a pénalisé beaucoup de joueurs de ma promo, car ils étaient beaucoup axés sur un jeu collectif et sur un développement collectif.

D'ailleurs, tu pars pour Monaco, qu'est-ce qui te fait choisir Monaco ? Est-ce que tu avais d'autres touches à l'époque ?

Mon club préféré quand j'étais jeune, c’était Metz. Je devais être le seul parisien qui était pour Metz (rires). Quand je fais mes tests pour Clairefontaine, j'ai deux offres, c'est Monaco et Metz.

Je vais en premier à Monaco visiter et quand je vais faire ma visite à Monaco, je ne dis pas qu’ils mettent le paquet, mais je fais mon retour en hélicoptère, des choses comme ça. Quand tu as 13 ans, c'est un peu waouh. Je signe et je ne fais même pas ma visite à Metz.

J'imagine qu'il y a un passif qui fait un peu rêver avec les joueurs qui sont sortis par le passé au sein de la formation monégasque.

Exactement. Après, je pense que, quand je signe en 98, avant de rentrer à Clairefontaine, je ne connaissais pas le foot, le business, comment ça se passait. Je ne dis pas de faire monter les enchères, mais tu étais juste content d'avoir un contrat à l'époque. J'étais plus impressionné qu'un club comme Monaco veuille de moi.

C'est quoi le souvenir de ton premier match pro avec Monaco ?

Mon premier souvenir, c'était au Vélodrome, Marseille Monaco en Coupe de la Ligue. Didier Deschamps avait envoyé pratiquement toute l'équipe réserve.

J'y suis allé avec la plupart de mes coéquipiers qui étaient en réserve. C'était un truc de fou. Jouer contre Drogba, premier match au Vélodrome pour commencer ta carrière, c'est très bien. (Rentré en cours de match à la place de Dado Prso.)

On avait perdu 2-0. C'est un très bon souvenir parce qu'on pensait prendre une raclée et finalement pas tant que ça.

Tu fais 3 ans et demi à Monaco, un prêt à Sedan et après, tu signes à Sochaux en 2007. Qu'est-ce qui te fait partir du côté de Sochaux ?

Ce qui me fait partir, c'est ce qui reflète ma carrière et ce qu'on m'a pointé du doigt. Je pense que le fait de ne pas avoir été assez efficace en termes de statistiques fait qu'à un moment donné, tu ne peux pas rester dans des clubs comme Monaco.Dans le sens où, d'être un bon dribbleur qui sent le jeu, etc., ça ne suffit pas à un moment donné. Tu es obligé d'avoir des stats pour pouvoir résister ou rester ou être vendu dans des clubs supérieurs à Monaco.

Tu disais dans une interview que les statistiques t'ont desservi pendant ta carrière.

Bien sûr. Le premier critère pour la réputation d'un bon joueur, surtout d’un offensif, ce sont ses stats. Ça m'a pénalisé.

En janvier 2008, Francis Gillot arrive à Sochaux pour maintenir l’équipe. C'était quoi ta relation avec lui ?

Il venait de récupérer un groupe qui était malade. Défaite sur défaite, on était relégable. J'étais déjà un peu à la cave avec l'ancien coach. Quand un coach arrive, il remet tout à zéro. Les premiers entraînements, j'ai su gagner ma place, derrière sa confiance. Je crois que les 5-6 derniers mois, je dois faire 4-5 passes décisives sur une opération maintien.

Je me suis entretenu avec lui, il y a quelques mois. Il m'avait dit à l'entraînement lorsque je lui ai parlé de Marvin Martin qu’il n’était pas forcément pas au-dessus de Ryad Boudebouz ou Nicolas Maurice Belay.

Ça fait plaisir d'entendre ça. Après, tu peux être un très bon joueur d'entraînement et juste un bon joueur de match. Comme tu peux être un bon joueur d'entraînement et un très bon joueur de match. Après, je pouvais être très fort jusqu'aux 18 mètres adverses. Et après les 18 mètres adverses, c'était peut-être un trou noir pour moi (rires). Il y a ça aussi. C'est un tout.

“Je me rappelle encore du coup de casque qu'il a envoyé contre Paris hors de la surface.”

Derrière, Francis Gillot t'amène avec lui à Bordeaux. Comment il t'a convaincu de venir aux Girondins ?

À Sochaux, on était tous les deux en fin de contrat. Il m'a pris dans son bureau et m'a dit que si je pars, j'ai envie que tu viennes avec moi. Et ça s'est fait comme ça.

Il m'a également dit qu'à Bordeaux, les deux premières années, il avait besoin de vitesse sur son côté. Le côté avec Benoit Trémoulinas et toi, c'était un des gros points forts de l'équipe. Qu'est-ce qui te demandait tactiquement ?

Tactiquement, je ne suis pas quelqu'un où tu peux demander des choses spécifiques dans le sens où sans me faire des fleurs, j'ai quand même une connaissance tactique. C'est juste de jouer mon jeu et de m'adapter au profil de joueur avec qui je joue.

Parce que, remplacer un mec comme Wendel, c'est hyper compliqué parce qu'il a marqué l'histoire du club. Et surtout, contrairement à moi, c'est un buteur exceptionnel. Je me rappelle encore du coup de casque qu'il a envoyé contre Paris hors de la surface. Il est incroyable ce but.

Donc, toi, tu arrives, tu n'as pas le même CV, tu viens avec ton coach, mais tu sais ce que tu peux apporter dans d'autres domaines. Dans ce qui est vitesse, percussion, relations techniques avec les joueurs. Je pense que c'est plus ça qu'il m'a dit, apporter mon jeu. Il savait que j'étais un joueur de collectif aussi.

Elle était comment l'entente avec Benoit Trémoulinas sur le côté gauche ?

Elle était exceptionnelle, parce que Benoit, c'est quelqu'un qui aimait beaucoup s'appuyer, redemander. Et moi, je pouvais rentrer intérieur, dédoublé avec lui, ça lui permettait de centrer. Chacun y trouvait son compte.

Moi un peu moins parce qu'on allait encore me taper dessus en termes de stats. Je savais que pour le bien de l'équipe, il fallait juste répondre au jeu et animer notre couloir comme il fallait.

Le point d'orgue, c’est cette Coupe de France 2013. Comment tu avais appréhendé le match avant la finale, sachant qu'en plus tu fais la dernière passe décisive d’un extérieur sur le but de Diabaté ?

C'était une saison qui était très longue. On avait la Ligue 1, la Coupe d’Europe (élimination en 8e contre Benfica), Coupe de France, Coupe de la Ligue, on avait enchaîné. On ne jouait pas forcément bien, on avait des résultats mitigés. Quand tu joues aux Girondins de Bordeaux, tu ne peux pas avoir des résultats mitigés.

Donc quand tu joues contre Evian, tu dois absolument gagner. En plus, tu es archi-favori. Pour sauver ta saison, tu es obligé de l'emporter. Juste avant, tu as les jeunes qui gagnent la Gambardella. Ça te met encore plus une pression de ne pas gâcher la fête. Tu gagnes 3-2 dans un match qui était assez agréable. Le seul truc qui était un peu relou, c'est que ça se joue un vendredi. Je pense que pour les fans, c'est compliqué de venir au match. Je finis sur une passe qui me rend décisif sur une finale. En plus, c'est un match important.

“Je n'avais pas une qualité naturelle qu'avait André Poko, c'est de gratter des ballons dans les pieds.”

Francis Gillot part quelques mois après ça. Tu t’es retrouvé avec de nouveaux coachs, notamment Willy Sagnol. Est-ce que tu as retrouvé la même osmose que tu avais avec lui ou c’était plus compliqué ?

Je ne dirais pas le mot compliqué, mais après c'était différent. C'était aussi la première année en tant que coach pour Willy Sagnol. Il sortait aussi de l'équipe de France espoir à cette époque-là. Il est arrivé aussi avec de nouveaux joueurs. Ce qui était perturbant au début, c'est que j'avais quitté un cycle. Certains étaient partis, comme Carlos Henrique, Benoit Trémoulinas, même s'il est parti un an avant, Micka Ciani, David Bellion. Il y a quand même une génération de joueurs qui n’étaient plus là. Forcément, il a fallu tout changer.

J'étais un peu plus un cadre par rapport aux trois années précédentes. Forcément, tu as un autre rôle. Après, il fallait s'adapter et toujours essayer de jouer et d'aider l'équipe du mieux possible.

En 2016, tu as même joué numéro 6. Comment s'adapte-t-on à jouer des postes où on n'est pas forcément prédisposé à jouer ?

Je pense que c'est la culture tactique. J'estime qu'on m'a donné les bases de la compréhension du jeu. Même si tu es allié gauche ou autre, ta culture tactique, à un moment donné, quand tu sais jouer au foot, tu sais la mettre à presque n'importe quel poste. Tu ne vas peut-être pas exceller comme un 6 naturel. Par contre, tu ne vas pas être bête dans ton placement, dans ta façon de jouer, dans ta lecture de jeu.

Et je pense qu'à cette époque-là, je m'en suis très bien sorti. Parce que, si je me rappelle bien, la plupart des matchs que j'ai joués à ce poste-là, j'ai pratiquement tout gagné. Si on prend un point de vue stat (rires).

Mais j'avais aimé jouer à ce poste-là. Parce que tu sais, à l'époque, il y avait beaucoup de blessés. Avant que moi, je me blesse gravement, justement. À cette époque-là. On avait enchaîné, je crois, 5-6 bons résultats de suite. Et je savais qu'à l'époque, je n'avais pas le choix avec mes problèmes de genou, il fallait ralentir le tempo, il fallait être moins sûr de la transition rapide.

Et ce qui me permet de sentir ces choses-là, c'est les joueurs que j'ai autour de moi. C'est-à-dire que je sais qu'à un moment donné, si on met le match sur un certain rythme, ça va nous mettre plus en difficulté. Si on ralentit, ça va être mieux pour nous. Plein de petits détails comme ça.

Parce que, quand tu joues 6, souvent le ballon passe par toi. C'est toi, à un moment donné, qui vas diriger le tempo du match. Je ne me suis pas trouvé en difficulté. Peut-être, ce qui était un peu dur pour moi, c'est d'aller récupérer dans les pieds naturellement. Je n'avais pas une qualité naturelle qu'avait André Poko, c'est de gratter des ballons dans les pieds. Par contre, j'allais le faire par intelligence de jeu. Peut-être que j'allais me sacrifier, faire en sorte qu'il la pousse trop loin pour qu’un partenaire la récupère. Plein de petits détails comme ça.@iconsport

Tu as aussi cette blessure, tu as commencé à le dire, au cartilage du genou. Comment tu l'as vécu, cette période-là ?

Ça a été un trou noir pour moi, dans le sens que ce sont des choses qui me gênent encore dans la vie de tous les jours, même pour me déplacer. Et franchement, ça a été... À la limite, je ne dis pas que tu fais une dépression, mais quand tu n'as jamais eu de blessure grave, ça t'arrive d'un coup. C'est violent.

C'est violent et tu as du mal à l'accepter. Et en plus, moi, je me suis fait opérer cinq fois, donc... Ça fait partie de la vie. Après, je ne m'en plains pas parce que j'ai vécu du football, j'ai eu le bonheur de vivre un rêve que beaucoup de jeunes joueurs auraient aimé vivre. Donc, je prends le bon côté des choses en me disant, écoute, il y a eu de bonnes choses dans ta vie, il y en a eu des moins bonnes, et puis tu dois avancer.

“Landry N'Guemo, j'ai une pensée pour lui.”

Est-ce que tu regardes encore Bordeaux aujourd'hui ?

Toujours, oui.

C'est quoi ton regard sur la saison actuelle en National 2 ?

Il est difficile parce que le point de vue, en fait, il va être tronqué. L'équipe s'est construite au mois d'août. Pas vraiment de préparation, tu es obligé de reporter certains matchs. Parce que, si tu jouais, tu allais te faire exploser. Donc, forcément, tu vois que l'équipe rattrape les équipes sur lesquelles, au classement, elle est en déficit. Et puis, depuis qu'on est passé premiers, trou noir. Tu as deux matchs qui semblent similaires, où tu égalises à la fin, tu prends des buts juste après dans le temps additionnels.

Et c'est plein de petits détails comme ça qui font qu'il y a de la frustration. Parce que tu as l'impression que ces points-là, tu aurais dû les récupérer.

Et puis j'ai l'impression que, depuis que tu es passé premier dans la gestion des émotions, on n'est pas bon là-dessus. On est peut-être pressé de gagner, pressé d'être premier. Alors qu'on est déjà revenu de l'au-delà il y a quatre journées.

Tu as côtoyé Cédric Yambéré qui est actuellement le capitaine. Comment était-il dans les vestiaires ?

C'est un leader qui a du caractère. Et c'est très bien pour le groupe, parce que je pense qu'il y a de jeunes joueurs qui peuvent être timorés de jouer aux Girondins de Bordeaux. Parce que c'est un club qui a une forte place dans le foot français. Et forcément, quand tu sais qu'il y a une forme de pression populaire de te dire que tu dois être premier, de le gérer, ce n'est pas évident pour les joueurs.

Andy Carroll va gérer ça facilement. Mais d'avoir un Cédric Yambéré en tant que capitaine, c'est important. Parce qu'en plus, il véhicule l'image de la Gironde.

Parce que c'est un enfant de Bordeaux, c'est un enfant qui aime le club. Et de l'avoir dans ton vestiaire, c'est hyper important pour faire comprendre aux joueurs ce que sont les Girondins de Bordeaux, et ce que réclame le niveau des Girondins de Bordeaux.

Dernière question, est-ce que tu as une anecdote vestiaire ou un match que tu n'as jamais raconté ?

Une anecdote comme ça, non. Landry N'Guemo, j'ai une pensée pour lui. Il y a eu sa disparition l'année dernière. Lui, c'était un boute-en-train dans le vestiaire, mais sans le faire exprès. Il avait un français qui était très à l'ancienne, on va dire, par rapport à ceux de la Métropole. Il n’utilisait pas de verlan, il n'y a pas de mot de « jeune », si tu veux. Il parlait comme un « président ».

Et dans le vestiaire, on en rigolait avec Henri Saivet. Parfois, il y avait des scènes avec lui et Abdou Traoré qui étaient mémorables.

Nathan Hanini

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