Entretien - Grégory Poirier (Martigues) : « C’est un sentiment de fierté d’être vu comme un favori de National » | OneFootball

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·27 mars 2023

Entretien - Grégory Poirier (Martigues) : « C’est un sentiment de fierté d’être vu comme un favori de National »

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Promu en National cette saison, le FC Martigues déjoue tous les pronostics depuis son retour au sein de la troisième division française. Plus petit budget du haut de tableau, le club des Bouches-du-Rhône est actuellement leader du championnat, à neuf journées de la fin. De quoi faire rêver le club et ses suiveurs, 30 ans après l’accession du FCM en D1. Au coude-à-coude avec Versailles, Concarneau et Dunkerque, le club martégal a vu son statut changer en l’espace de quelques semaines. Favoris pour la montée en Ligue 2, les hommes de Grégory Poirier savent toutefois qu’ils n’ont plus le droit de laisser des points s’échapper comme face au Red Star (0-2) et au Paris 13 (2-2). Les objectifs du début de saison, les nouvelles ambitions, son parcours, ses inspirations, son style de jeu, l’attente derrière le club… entretien avec Grégory Poirier, un entraîneur qui fait passer ses principes de jeu et son humanité avant tout !

Grégory, on imagine que tu es soulagé après la large victoire contre Avranches (3-0) vendredi dernier ?


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C’est un sentiment de satisfaction comme on était un peu dans le dur. Soulagement je ne sais pas parce qu’on n’est pas programmés pour être là. Ça l’est un peu car on atteint cette barre des 44 points mais j’y croyais quand même puisqu’on était bien embarqués pour le maintien. Les matches sont difficiles, on le voit tous les week-ends. Il n’y a pas de favori, tout est serré. Dans certains domaines, c’est un match référence. On n’a pas été extraordinaire dans le contenu mais on a bien géré le match. On a fait un match solide dans l’abnégation et la solidarité.

Vous restiez sur une défaite et un match nul, qu’est ce qu’il vous manquait ces deux dernières semaines ?

Il y avait plusieurs facteurs. Les adversaires qu’on a eu n’étaient vraiment pas évidents. Le Red Star est venu faire un gros match chez nous. Paris 13 est beaucoup mieux depuis le changement de coach. Il y a l’adversité mais on n’est plus regardé comme un promu mais comme une équipe de haut du classement. Et c’est vrai que j’avais soit des absences soit des creux physiquement dans les matches. C’est un tout.

Vous êtes l’un des favoris pour la montée en Ligue 2, qu’est-ce qu’il vous faudrait pour finir parmi les deux premiers à la fin de la saison ?

Je suis plutôt fier qu’on dise ça à neuf journées de la fin même s’il reste encore quelques matches avant la dernière ligne droite. Il faut savoir qu’on n’était vraiment pas programmés pour ça. C’est une aventure extraordinaire. On essaye d’en profiter. Il faudrait qu’on arrive à garder cette exigence, ce dépassement de soi dans les valeurs qu’on met tous les jours. Il va falloir ce supplément d’âme puisqu’on sait qu’on n’a pas le droit à l’erreur. Il va surtout falloir des contenus tactiques et techniques très exigeants pour pouvoir continuer de déjouer les pronostiques. Si on veut continuer de renverser des montagnes et créer un exploit il va falloir être très régulier. On sait que ça va être très difficile mais aujourd’hui c’est un sentiment de fierté d’être vu comme un favori.

Le maintien était votre objectif principal, mais vous étiez-vous fixés un minimum de points ?

Quand on venait de monter, on a dû faire des choix sur l’équipe. On a voulu changer le système, ce qui veut dire que l’effectif a dû suivre. En tant qu’entraîneur, je ne suis pas du genre à me dire « Maintien, montée… ». J’essaye de me donner les moyens de remplir les objectifs du club. Bien sûr que les objectifs étaient de se maintenir, de structurer le club à ce niveau. C’est plus mes adjoints, en analysant la réforme des championnats nationaux, qui ont calculé ce nombre de points. Par rapport à ce qui se fait ces dernières années, il fallait 44 points. Après, on n’a pas vécu ce cap comme une libération mais on est contents d’atteindre ce total à neuf journées de la fin.

Une montée possible trente ans après l'accession du club en D1

On imagine qu’il y a un certain engouement maintenant derrière le FC Martigues et son entraîneur ?

Oui. C’est un club qui a une histoire. Il y a trente ans, le club a connu la D1. Ça fait plaisir à ces gens-là puisqu’on reparle de leur histoire. Il y a certains de mes joueurs, à l’image de Foued Kadir, qui ont connu cette histoire. C’est toujours bien de s’appuyer sur ça. C’est un club et une ville qui ont connu ce niveau même si c’était il y a longtemps. Mais on voit qu’on attire les gens au stade. On a un capital sympathie avec ce qu’on propose sur le terrain. C’est tellement rare qu’un promu en National avec peu de moyens arrive immédiatement à être en haut du classement. Il a fallu recréer de l’engouement et aujourd’hui, ça fait plaisir de faire rêver les gens et surtout les plus jeunes, qui n’ont pas connu le FC Martigues en première division.

Martigues a fini champion de France de N2 la saison dernière. Est-ce-que, à ce stade de la compétition, le titre de champion de National peut devenir un objectif plausible ?

Non. Pour l’instant je ne suis pas trop sur ça. Je me projette juste sur les prochains matches et sur le fait de continuer à mettre en place ce qu’on a vu contre Avranches. Je pense que ce serait un peu prétentieux et gourmand de parler de titre de champion de National. Bien sûr que notre expérience de l’année dernière, comme mon expérience personnelle, nous sert. Si j’arrive à jouer la montée, ce serait ma dixième en tant que joueur et entraîneur, à 40 ans. C’est plus ces aventures qui nous servent mais le titre de champion en lui-même n’est pas une fin en soi. L’objectif est de tenir encore pour pouvoir faire partie de la dernière ligne droite. Je pense qu’on doit encore se concentrer sur gagner le match qui vient (lundi 27 face au Mans) pour ne pas s’enflammer. Il ne faut pas se disperser.

Comment fais-tu pour garder les pieds sur terre ?

Aujourd’hui, je réponds aux sollicitations mais notre force est de rester dans notre bulle, de ne pas se prendre pour d’autres. On ne se prend vraiment pas la tête. On parle très peu de classement mais on ne veut et on ne peut pas empêcher les gens de rêver. On veut vivre l’aventure à fond aussi donc c’est pour ça que j’essaye de trouver le bon dosage. Mais on ne va pas s’enflammer. On sait que tout est serré, il reste encore 27 points à prendre donc c’est trop tôt. Comme on sait d’où l’on vient, on a cette force de rester tranquille. On essaye de rester calme et de bien gérer nos émotions. Il ne faut pas non plus se cacher ou avoir un complexe d’infériorité. Mais on sait qu’on est attendus donc on doit répondre à ces problématiques à court terme.

Il y a trente ans, Martigues accédait à la D1, c’est l’occasion rêvée pour écrire une nouvelle page de l’histoire du club ?

Encore hier, un ancien était au club pour nous parler de cette histoire. On voit que ceux qui l’ont connu revivent leurs émotions à travers nous. En tant qu’entraîneur, au-delà de l’aventure qu’on vit, c’est top de pouvoir rappeler au bon souvenir tous ces gens-là qui ont fait le grand FC Martigues. Mais c’est sûr que le timing est exceptionnel. Ce qu’on vit avec peu de moyens et la concurrence qu’il y a dans ce championnat… On s’imaginait même que ça allait être très compliqué pour le maintien. C’est juste extraordinaire.

Vous êtes maintenant beaucoup plus attendus qu’en début de saison. Vous avez donc dû changer vos approches de matches non ?

Dans notre façon de jeu, on a très vite mis en place un projet de jeu en guise de « valeur refuge » sur lequel on s’appuie sur les moments difficiles ou forts. Avec mon staff, le but est de prévenir les garçons, surtout sur l’aspect mental. On a très vite vu qu’on basculait dans un autre championnat quand les équipes nous attendaient. Au quotidien, et dans notre façon de jouer, on a toujours gardé notre identité de jeu basée sur le plaisir, qui n’empêche pas d’être exigeant. À l’image de Foued Kadir (39 ans), si nos séances n’étaient pas basées sur le plaisir, il ne viendrait probablement plus aux entraînements. On fait toujours autant de vidéos, pas plus, pas moins. Mais on se remet en question sur pleins de choses. On essaye d’avoir cet équilibre. La direction nous pousse aussi donc tout ça fait que Martigues ça marche.

À la rencontre de Grégory

Que ferais-tu si vous veniez à être champion de National ?

Je ne sais pas trop. Il y aurait plusieurs sentiments qui me viendraient. Aujourd’hui, c’est encore trop tôt pour me l’imaginer. Je suppose que ça serait un sentiment extraordinaire. Je pense que j’aurai de la reconnaissance envers mes joueurs, mon staff et ceux qui ont essayé de nous aider. Sur l’aspect personnel, j’aurai une pensée pour mes proches avec qui j’ai vécu des moments délicats.

Comment te décrirais-tu en tant que coach ?

Je m’appuie beaucoup sur mon vécu. J’ai eu la chance de vivre des montées en tant que joueur avec Arles et Amiens. Aujourd’hui, il faut savoir un truc, quand tu montes de Ligue 2 à Ligue 1, tu veux jouer l’OM et le PSG. Mais monter de National à la Ligue 2, c’est un quotidien qui peut changer. Ça dépasse le cadre du sportif. Si jamais on arrive à monter, c’est le club qui devient professionnel avec une ville de 50.000 habitants qui pousse derrière. On vit un moment énorme. C’est là qu’il faut gérer les émotions. Je dois alterner entre l’ambition et la gestion des émotions. Dans mon management, je suis proche de mes joueurs et mon staff. Je pense qu’un coach est obligé d’être fédérateur aujourd’hui. Mais le plus important reste le projet de jeu.

Vous jouez en 4-3-3, pourquoi ?

On a un projet de jeu basé sur le plaisir. Lors de la montée en National, on aurait pu être frileux mais j’ai demandé à ce qu’on joue encore plus au ballon. On est passé du 3-5-2 au 4-3-3 pour avoir un équilibre encore plus haut sur le terrain et moins subir. Dès notre arrivée (son staff et lui), on a mis l’animation offensive au centre de nos principes. Petit à petit, on a trouvé l’équilibre défensif qu’il fallait. Aujourd’hui, le résultat passe par le jeu à Martigues et c’est une de nos fiertés. J’essaye d’inculquer la culture de la gagne à mes joueurs. Je veux que tous mes joueurs attaquent et défendent ensemble. J’ai aussi un staff sur lequel je peux m’appuyer. Tout en ayant peu de moyens, on reste cohérents dans nos choix. J’ai également l’appui de mon président et de mon directeur sportif. Tout ça fait qu’on travaille tous bien. Il y a un climat de confiance et du coup il y a des résultats derrière.

De quel entraîneur t’inspires-tu en Europe ?

En tant que consommateur de football, je différencie vraiment les références avec mon côté entraîneur. Carlo Ancelotti (Real Madrid) a cette gestion de la compétition avec les joueurs de haut niveau. C’est quelqu’un qui est incroyable dans ses résultats mais j’adore ce que propose Arne Slot (Feyenoord) ou ce qu’ont proposé Jorge Sampaoli (OM) ou Thomas Tuchel (PSG / Chelsea). Il y a aussi Didier Digard. Je pense, qu’aujourd’hui, il a l’idée de prendre du plaisir, d’être naturel avec ses joueurs et de faire en sorte que son équipe joue ensemble. Je pense que, même si c’est une mode, il est vraiment bon. Beaucoup d’équipes jouent bien cette année. Le football, notamment en Ligue 1, est en train de changer. Il y a beaucoup d’équipes joueuses qui n’étaient pas là il y a quelques années. Je kiffe les équipes qui jouent ensemble, c’est ça qui est plaisant. Après il faut avoir des individualités à l’intérieur mais je pense que c’est très plaisant quand tu arrives à trouver un football dynamique.

Justement, tu nous parlais d’être proche de ses joueurs, toi qui fait partie de cette nouvelle génération d’entraîneurs…

Notre âge nous permet d’avoir des centres d’interêts en commun avec les joueurs, des réflexes, des ressentis, des codes de comportements... J’ai eu la chance de connaître les nouveaux codes, les nouvelles mentalités donc forcément il n’y a pas de décalage. Après, en tant que coach, on a un devoir d’exemplarité. Il faut l’exigence et la barrière qui va avec. Mais on vit tous les jours ensemble donc il faut que les joueurs se retrouvent en nous regardant. Je me suis toujours intéressé à l’humain et pour moi c’est quelque chose d’important de se mettre à la place des joueurs. Mon objectif est de les mettre dans les meilleures conditions, de les mettre en confiance tout en étant exigeant avec eux.

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