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·29 novembre 2019

Comment Freddy Adu est-il devenu LE crack déchu ?

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Freddy Adu. Ce nom est connu des fans de football du monde entier. Et pourtant, très peu l’ont vu jouer. Professionnel à 14 ans, joueur international à 17, en Europe à 18, sa carrière a progressé d’une façon fulgurante ! Peut-être un peu trop pour lui…

Promis à un bel avenir dès son plus jeune âge, sa carrière ne s’est pourtant pas du tout déroulée comme prévu ! À maintenant trente ans, le milieu offensif aura joué dans douze clubs différents depuis son départ de son club formateur de DC United en MLS en empilant plus d’échecs que de buts. Alors comment expliquer cet échec qui est maintenant devenu une référence lorsqu’on parle de jeunes pousses prêtes à briller mais dont le potentiel est à confirmer ? Explications !


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Une avenir à priori tout tracé…

Formé à l’IMG Bradenton Academy (l’INF Clairefontaine américain, NDLR) qui voit de beaux noms sortir de sa formation tels que Michael Bradley, Landon Donovan, Kyle Beckerman ou encore Michael Parkhurst, le jeune Adu est vite repéré par DC United qui le fait signer dès ses quatorze ans ! Pour le gamin né au Ghana, c’était un autre coup du destin. En effet, six ans plus tôt, il quitte sa ville natale de Tema car sa mère gagne à une loterie d’immigration qui le fait arriver lui et sa famille dans le Maryland, aux Etats-Unis.

Fou de ballon depuis toujours, il exporte donc son talent de l’autre côté de l’Atlantique où ses qualités attirent les regards des plus connaisseurs. Grâce à ça, il a même reçu des offres de 15.000 à 150.000 dollars de l’Inter Milan après un tournoi de jeunes en Italie pour s’attacher ses services. Mais sa mère qui cumulait deux boulots à plein temps pour s’en sortir refuse toutes les sollicitations, trouvant son garçon beaucoup trop jeune.

“Je recevais dix appels par jour, même au travail, parfois, je pleurais la nuit en y réfléchissant”La mère de Freddy Adu (Sports Illustrated)

Elle lui fait ensuite intégrer le programme de Bradenton en 2002. Il a alors treize ans mais jouera avec les moins de dix-sept ans. Un début de précocité que sa mère a préféré préserver.

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Adoubé par le Roi Pelé (rien que ça), son nom circule parmi les plus grands espoirs mondiaux comme Lionel Messi, Wayne Rooney, Rafael Van der Vaart… En avance sur les jeunes de son âge physiquement, il ne faut pas oublier qu’aussi jeune, sa faiblesse reste le mental ! D’autant plus que son éclosion a été fortement poussée par le récent commissaire de la MLS, Don Garber, qui a tout mis en œuvre pour en faire son premier gros coup pour sa Ligue. Quelle pression !

Freddy Adu est alors sélectionné en premier choix de la draft 2004 par le club de la capitale américaine : DC United. Sa technique de dribble fulgurante et une adresse devant le but déjà présente faisaient de lui le “prochain Pelé“, le “Mozart du foot” disait-on ! A quatorze ans, il émarge à 500.000$ par mois ce qui fait en fait le joueur le mieux payé du championnat… 14 ans seulement ! Sportivement, il cumule onze buts lors de ses trois saisons premières saisons professionnelles en Major League Soccer, pas exceptionnel mais très prometteur. Ces bonnes performances ont même fait douter certains experts le jugeant trop développé et athlétique pour son âge.

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En 2007, il connaît son premier transfert mais reste en Major League Soccer et c’est le Real Salt Lake – après avoir été recalé du centre de formation de Manchester United faute de permis de travail – qui le récupère avec Nick Rimando. La cause de son départ ? Il souhaitait un plus grand rôle que celui qui lui était donné à DC United, au plus grand plaisir du club de l’Utah. Le moins que l’on puisse dire c’est qu’au final, l’arrivée du gardien américain de dix ans son aîné aura été une bien meilleure réussite !

« Freddy est l’un des joueurs les plus reconnus du football américain, son ajout à notre liste nous permet d’améliorer notre fonctionnement à plusieurs niveaux. Il fait instantanément de nous une meilleure équipe sur le terrain et augmentera également notre niveau de notoriété. » Dean Howes, directeur général de RSL

Finalement, après onze matchs joués, un seul but inscrit pour aucune victoire lorsqu’il était sur le terrain, son transfert se révélait être un flop. En ajoutant à ça son envie de découvrir l’Europe, il n’en fallait pas plus pour que le jeune néo-international soit sur le départ. Le premier club européen à jeter son dévolu sur le (pour l’instant encore) prodige de l’Oncle Sam sera donc le Benfica Lisbonne, au Portugal.

“Mon rêve était de disputer la Ligue des champions et de jouer dans une grande équipe. J’ai eu la chance de le faire avec Benfica. Dans mon esprit, je voulais aller en Europe et prouver que je pouvais réussir. Même dans une petite ligue, à mes yeux, c’était toujours mieux que de jouer en MLS. Mais aujourd’hui, quand je regarde la MLS, je me dis que c’est un des championnats les plus réputés du monde.“Freddy Adu explique dans une interview son échec au Benfica Lisbonne (Goal)

Seulement voilà, là encore même constat d’échec. Incapable de s’imposer dans un club qui pourtant sait polir de jeunes pépites, il est prêté en Ligue 1 à l’AS Monaco qui joue alors le milieu de tableau. Son arrivée n’est pas un hasard, le nouveau président du club n’est d’autre que Jérôme De Bontin (homme d’affaires franco-américain) qui a entendu parler du “phénomène Adu” et veut en faire lui aussi son gros coup pour le club. Pensant gagner en temps de jeu, le jeune américain ne dispute finalement que neufs petits matchs sans jamais être titulaire, son option d’achat n’est pas levée et il retourne ainsi en Liga NOS. C’est le début de sa longue descente aux enfers…

De 2009 à 2011, il découvrira trois autres clubs dans trois pays différents (Portugal, Grèce et Turquie) sans jamais y rester plus de six mois. A la fin de son contrat avec Benfica, il retourne au pays pour signer au Philadelphia Union de l’attaquant français Sébastien Le Toux. Et là, chose devenue incroyable, il se remet à jouer régulièrement, et même marquer ! Assez pour lui redonner confiance et tenter après une saison et demie en MLS de repartir à l’étranger : à Bahia au Brésil. A vingt-trois ans, c’est un coup de poker qu’il tente alors connaissant ses mésaventures à l’étranger. Échec.

Après de nombreux essais infructueux à Stabaek (Norvège), Blackpool (Angleterre) ou encore l’AZ Alkmaar (Pays-Bas), il atterrit cette fois en Serbie où son adaptation culturelle est là aussi compliquée. Sans disputer la moindre minute de championnat avec FK Jagodina, il s’envole pour la découverte d’un nouveau pays, la Finlande, où le club de Kuopion Palloseura (KuPS) l’accueille. Enfin, après un énième raté, il retrouve son pays d’adoption mais pas en MLS, car oui, son talent n’est plus reconnu du tout au pays et d’autres ont pris sa place comme l’attaquant de Chelsea Christian Pulisic. Il alterne donc entre chômage et clubs des divisions inférieures (Tampa Bay Rowdies en NASL puis Las Vegas Lights FC en USL). Entre ces deux passages en USL, il est même devenu vendeur d’aspirateur…

Statistiquement, l’ex-international américain n’aura « réussi » qu’en MLS, chez lui.

Alors pourquoi ce crash ?

“À 14, 15, 16 ans, vous êtes jeune, vous êtes immature. Heureusement, j’avais ma famille et mes amis autour de moi pour me diriger dans la bonne direction. Mais peut-être que je ne me suis pas entraîné aussi dur que j’aurais dû. Ça m’a fait mal, cela a sans doute empêché mon développement. Mais ce que la plupart des gens ne savent pas, c’est que j’ai décidé tout seul de signer pro à 14 ans parce que ma famille était pauvre. À ce moment, ma mère était une mère célibataire ayant deux à trois emplois. Qu’aurais-je dû faire ? Dire non à des millions de dollars à cet âge alors que ma famille ne s’en sortait pas ?”Les aveux de Freddy Adu à la presse anglaise après un essai raté à Blackpool

Ces révélations de Freddy Adu en disent long sur son investissement personnel dès le début de sa toute jeune carrière. Il faut dire qu’à son âge, les jeunes footballeurs pensent à leur scolarité avant le football car aucun n’en vit. Pour lui, cela aura été l’inverse.

Très tôt il devient donc grâce à sa notoriété, un produit marketing. Le premier sponsor à décrocher le jackpot est Nike. Le « soccer » étant encore méconnu aux Etats-Unis, la marque voit en lui une possibilité de le faire découvrir dans un nouveau pays avec potentiellement plus de 300.000.000 de licenciés. Porte-drapeau du soccer aux USA tout juste adolescent, voilà donc le destin qu’attendait Adu. Qui dit sponsors, publicités et notoriétés dit argent. Et c’est ce dont manquait cruellement sa famille. Tout va très vite pour lui, trop vite et le gamin se perd. Ce qui devait être une aubaine finit en fardeau et son contrat d’un million de dollars conditionne ses performances.

Sportivement, sa fragilité mentale a probablement démarré après sa non-sélection pour la Coupe du Monde 2006 avec les Etats-Unis en 2006. Bruce Arena, le sélectionneur de l’époque, préférait s’appuyer sur des joueurs d’expérience jouant en Europe comme Brian McBride (Fulham FC), DaMarcus Beasley (PSV Eindhoven) ou Claudio Reyna (Manchester City). Ainsi donc, jouer sur le vieux-continent pouvait devenir un objectif, une obsession afin de démontrer tout son potentiel, à tel point que la pression était finalement trop forte. Ajoutez à cela que son talent inné pour le ballon rond n’avait pour lui pas besoin d’être maintenu à niveau (à l’entraînement), mais le haut niveau l’a assez vite rattrapé.

Alors au final, arnaque ou erreur de casting ? Lors de son passage à Benfica, Adu a pourtant côtoyé des joueurs aussi prometteurs que lui à un ou deux ans près comme Fábio Coentrão et Ángel Di María (qui finiront au Real Madrid) ou David Luiz (qui signera ensuite à Chelsea). Bien entouré, il aurait dû montrer tout ce dont il était capable. Seulement la concurrence rude et le manque de travail ainsi le niveau de la Major League Soccer (surtout à l’époque) était bien loin de celui des championnats européens. Son talent pouvait ainsi peut-être éblouir aux USA, mais serait moins impressionnant dans des top clubs. Et ce qui devait être une confirmation finira donc en cuisant échec tant statistiquement que mentalement. Et lorsqu’un joueur aussi fragile mentalement connaît l’échec, il est difficile ensuite de s’en relever. C’est malheureusement ce qui lui est arrivé par la suite, enchaînant les prêts, mauvaises prestations et perte de confiance (personnelle et de ses coachs). En réalité, tout est allé trop vite pour lui, l’exposition médiatique autour était trop forte, il n’était tout simplement pas prêt.

À aujourd’hui trente ans, il encadre des jeunes après avoir fait un dernier round dans l’anonymat presque complet en USL Championship à Las Vegas Lights, dans la ville de l’argent et capitale du divertissement ironie du sort…

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